Evaluation de l’utilisation du numérique dans l’enseignement de l’histoire de l’art

Monographie pour l’Ecole du Louvre, Mars 2004

Auteur : Marianne Serra

Sous la direction de : Xavier Perrot

Personne ressource : Michel Lefftz

 

 

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         Depuis 2002, un livre « underground » circule contentant tout le programme de la troisième année d’histoire générale de l’art de l’Ecole du Louvre. Trois générations d’élèves se sont succédées pour le construire. Ces élèves ont recherché dans les livres et sur Internet tous les clichés[1] projetés à chaque cours, et les ont reproduits sur un support numérique. Le texte des cours était enregistré, puis dactylographié et reproduit sur ce même support. De nombreux élèves, anonymes ont contribué à cet ouvrage. Gravé sur un CD, infiniment réplicable à l’identique et sans grand coût, ne tenant pas de place, il circule sous le manteau. Ce cédérom, que nous avons aidé à compléter, a largement contribué à nos révisions de fin d’année.

         Un autre cédérom circule, qui peut déranger davantage. Celui-ci contient des photographies numériques prises de l’écran de projection lors des cours. Il est accompagné, ou pas, des cours dactylographiés. Le microphone étant seulement toléré, et pas par tous les professeurs, je me demande ce qu’il en est des appareils photographiques. J’imagine que cela peut déranger un professeur de savoir que tout le contenu de son cours est accessible sur un support si facile à diffuser, sans qu’il puisse vérifier l’authenticité des propos qui lui sont attribués.

         Dans le même temps, M. Peltier, professeur d’histoire des arts d’Océanie, tentait, en cours organique, de projeter des images numériques, non sans quelques difficultés inhérentes au changement d’outil.

         Ainsi m’est venue l’idée de cette évaluation de ce que le numérique pouvait et, à mon sens, devait apporter à l’enseignement de l’histoire de l’art, et tout particulièrement à l’Ecole du Louvre. Je dédie donc ce mémoire à tous les professeurs de mon Ecole, en espérant qu’il éclaircira quelques points obscurs des nouvelles technologies.

 

         Je tiens à remercier Monsieur Michel Lefftz de l’Université Catholique de Louvain de m’avoir accordé un peu de son temps et de son attention. Merci également de m’avoir transmis le rapport de Séverine Livin et Anne Verwaerde, dont l’étude m’a été précieuse. Toujours à l’UCL, merci à Monsieur Ralph de Koninck de m’avoir permis d’assister à son cours, et d’avoir répondu à mes quelques questions.

         De l’Ecole du Louvre, je remercie tout particulièrement Mme de Font-Réaulx, qui a su répondre si promptement à mon mèl pourtant si tardif.

         Je suis très reconnaissante à Monsieur Xavier Perrot, d’avoir accepté ma proposition de sujet de monographie, mais aussi de m’avoir soutenue dans cette aventure.

         Enfin, merci à mes amis de l’Ecole, qui se reconnaîtront, de m’avoir aidée et encouragée pendant ces quelques années (et merci pour le CD !).

 

 


Sommaire

 

Introduction

 

I.     ETAT DES LIEUX

A. Un cours d’histoire générale de l’art à l’Ecole du Louvre aujourd’hui

B. Les limites du système actuel

C. L’information disponible

D. Du côté des élèves

 

II.   L’UTILISATION DU NUMERIQUE POUR LA PRESENTATION D’UN COURS D’HISTOIRE GENERALE DE L’ART

A. L'image numérique

B. La mise à disposition et la gestion des images numériques

C. La présentation d’un cours numérique

D. L’offre multimédia

E. Dans un futur proche

 

III.  PROPOSITION POUR L’UTILISATION DU NUMERIQUE AVANT ET APRES LE COURS

A. Recherches et communication pour les professeurs

B. Recherches et communication des élèves

C. Un exemple de logiciel spécialisé : eGems Communicator

D. La fin du livre ?

E. Les révisions

F. Autoévaluation et évaluation

Conclusion

Table des illustrations et des annexes

Bibliographie

 

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Evaluation de l’utilisation du numérique dans l’enseignement de l’histoire de l’art : Introduction


         Au congrès d'historiens d'art de Vienne, en 1873, Bruno Mayer invita ses collègues à admirer le processus de projection d’images en utilisant une source lumineuse. Il présenta une machine appelée le Skioptikon capable de projeter sur un mur des images enregistrées sur verre.

         Ce processus avait été dévoilé et exposé à la première exposition mondiale, en 1851 à Londres, et était connu pendant un certain temps comme Lanterna Magica. Mais cela a pris environ cinquante ans, et une personne de la stature de Hermann Grimm, pour persuader le milieu universitaire de reconnaître le Skioptikon[2].

         Finalement, tous les instituts d’enseignement d’histoire de l’art sont passés à la projection d’images sur plaques de verre. Plus tard, le passage vers la diapositive 35mm n’était qu’une évolution naturelle.

         Les diapositives sont encore très largement utilisées aujourd’hui, mais un nouveau moyen de montrer des œuvres est apparu : le numérique.

         Le numérique définit non seulement les images digitalisées, mais également tous les systèmes de bases de données informatiques, de mise en commun d’informations sur réseau, ainsi que les logiciels de présentation, d’édition d’image, de communication, et bien d’autres encore. Son utilisation dans l’enseignement de l’histoire commence à se généraliser, du moins en ce qui concerne les images. A l’Ecole du Louvre, quelques professeurs se lancent dans cette aventure, timidement. Ce texte est destiné à les encourager, en leur présentant très schématiquement, les possibilités de cette nouvelle dimension qu’est l’informatique.

         Nous aurions souhaité avoir plus de contacts avec différentes universités dans le monde, utilisant le numérique plus que notre Ecole. Malheureusement, de la vingtaine de personnes que nous avons cherché à joindre, trois seulement ont répondu. Ce mémoire est donc avant tout une synthèse d’expériences personnelles et de recherches documentaires (surtout en ligne, car il y a peu d’écrits publiés sur ce sujet), et de contacts précieux, surtout à Paris et à Louvain-la-Neuve, en Belgique.

         Nous tenterons tout de même de répondre à trois questions dans l’ordre :

§        Quelle est l’utilisation que font actuellement les professeurs et les élèves d’histoire de l’art du numérique ?

§        Quelles possibilités offre le numérique pour la présentation d’un cours d’histoire de l’art ?

§        Quelles possibilités offre le numérique pour l’étude, les révisions et les examens d’histoire de l’art ?

        

         Nous n’aborderons pas ici la problématique de l’enseignement à distance (e-learning) car nous estimons qu’elle n’est pas spécifique à l’histoire de l’art.

         N’étant pas spécialiste du droit, nous n’aborderons pas non plus les questions juridiques autour de l’utilisation de l’image numérique. Une directive européenne[3] précise que cette utilisation est autorisée dans le cadre de l’éducation pour les œuvres tombées dans le domaine public (donc l’auteur est décédé depuis plus de 70 ans).

         Par ailleurs, l’Ecole du Louvre nous ayant demandé de rendre de mémoire sous forme papier et sur un cédérom, ce texte est écrit pour être lu sur un ordinateur, en ligne et hors ligne. Il est doté de nombreux liens hypertextes (qui apparaîtront en gris sur la version papier). Les liens dans le texte mènent à des fichiers sauvegardés sur le cédérom. Les liens en note de bas de page conduisent, eux, à l’adresse URL présentée.


 

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        I.                  Etat des lieux


 

A.     Un cours d’histoire générale de l’art à l’Ecole du Louvre aujourd’hui

        

         Ce mémoire est écrit pour l’Ecole du Louvre (EDL), et rédigé par une ancienne élève de son premier cycle d’histoire générale de l’art (HGA). Nous nous attacherons à recenser les problématiques soulevées lors d’un cours d’histoire de l’art à l’EDL. Nous comparerons ce cours aux cours d’HGA d’autres institutions d’enseignement secondaire, notamment l’Université catholique de Louvain, sur laquelle nous avons pu lire une étude riche et détaillée, et où nous avons eu l’occasion d’assister à un cours d’HGA[4] et de nous entretenir avec deux professeurs d’histoire de l’art.

         A l’Ecole du Louvre, l’enseignement de l’histoire de l’art se divise en deux blocs : le tronc commun où est enseignée l’histoire générale de l’art de la préhistoire à nos jours, sur trois années, et le cours organique, spécialité choisie par l’élève. La spécialité est elle-même sous divisée en trois types de cours : le cours organique, ouvert conjointement aux élèves des trois années, ainsi qu’aux auditeurs ayant choisi cette spécialité ; et le cours annexe, ouvert, selon les spécialités, aux élèves des trois années, ou d’une seule année ; enfin, les travaux pratiques, qui ne sont pas dispensés pour toutes les spécialités, mais qui regroupent généralement un petit nombre d’élèves à la fois.

         Le bloc d’histoire générale de l’art, accessible uniquement élèves, est également sous-divisé. Nous avons des cours en amphithéâtre, avec toute la promotion, six cents élèves, environ, en première année. Nous avons également des séances de travaux dirigés devant les œuvres (TDO), dans les différents musées et monuments de Paris et de sa région. Ces TDO se déroulent par groupes de quinze, en moyenne.

         Nous considèrerons essentiellement les cours d’histoire générale de l’art en amphithéâtre. En effet, c’est surtout pour ces cours magistraux que se pose la question de l’utilisation du numérique. De plus, peu d’autres écoles peuvent dispenser des cours directement devant les œuvres. Nous ne pouvons donc pas comparer de façon réaliste les cours en petit groupe de l’EDL et des autres établissements.

         Voyons d’abord le déroulement d’un cours d’HGA à l’amphithéâtre Rohan, en premier cycle de l’Ecole du Louvre. Cette description est une synthèse d’expériences personnelles en tant qu’élève[5], et de conversations occasionnelles et impromptues avec des professeurs.

        

         Le professeur arrive environ un quart d’heure avant le début du cours, avec ses diapositives, afin de les placer dans les deux carrousels mis à sa disposition. Il peut éventuellement fournir des documents à scanner par l’appariteur et à projeter grâce à un projecteur data. En de très rares occasions, une vidéo sur cassette VHS a été projetée à l’aide d’un projecteur vidéo. L’appariteur restera en régie pendant toute la durée du cours afin d’assurer les réglages de diapositives, de projecteurs, de lumière et de son. Un seul professeur a utilisé un diaporama numérique depuis son ordinateur portable[6].

         Le cours dure une heure et demie, durant laquelle, le professeur projette entre quarante et soixante-dix clichés, qu’il fait défiler grâce aux boutons placés sur le pupitre. Ces clichés présentent soit des œuvres différentes, soit des vues différentes d’une même œuvre. Presque tous les professeurs utilisent les deux carrousels, afin de comparer les images. Lorsqu’une diapositive est à l’envers, ou lorsque le professeur souhaite changer de moyen de projection (data ou vidéo), l’appariteur en régie fait le nécessaire. Parfois les professeurs projettent des transparents, photocopies couleurs d’images tirées de livres, grâce au rétroprojecteur qui se trouve à côté d’eux.

         Dans certaines matières où les noms sont parfois difficiles à orthographier, le professeur les épelle, ou les écrit sur une feuille du rétroprojecteur. Certains professeurs établissent une liste de noms complexes qu’ils projettent au début et à la fin du cours, afin que les élèves la recopient[7]. D’autres distribuent, en plus des polycopiés de la bibliographie d’usage, un lexique ou une liste de mots empruntés à une langue étrangère et dont il faut être sûr l’orthographe[8]. Dans d’autres établissements, notamment en Belgique, aux Etats-Unis et au Canada, il est fréquent que les professeurs fournissent à chacun des élèves un syllabus, un recueil de documents comportant le plan du cours et une bibliographie, et parfois un petit lexique et une liste de clichés. Dans certains cas, ce recueil comporte des reproductions des clichés les plus importants.

         A l’Ecole du Louvre, lorsque le cours est terminé, rares sont les professeurs qui se disent à disposition des élèves pour répondre à d’éventuelles questions. Lorsque cela est le cas, l’élève doit aller voir le professeur (généralement pressé) à l’avant de l’amphithéâtre et attendre son tour pour poser sa question. Il est dommage que, le professeur ne parlant plus dans le microphone, personne d’autre ne profite de la réponse. Sur les trois années, un seul professeur[9] propose de prendre dix minutes à la fin de son cours pour répondre aux questions des élèves devant tous et non en aparté. Cela encourage les élèves qui sinon hésiteraient à poser leur question. Un professeur[10] donne également son adresse mèl afin que l’on puisse lui poser des questions, même après le cours.

 

B.     Les limites du système actuel

 

         Il faut noter que l’Ecole du Louvre a fait l’objet d’une grande campagne de rénovation il y a peu. Nous avons le privilège de bénéficier d’un matériel récent, abondant et performant par rapport à d’autres institutions. En effet, bien que toutes les universités d’histoire de l’art disposent d’un projecteur de diapositives dans leur amphithéâtre principal, beaucoup d’entre elles ne semblent pas disposer de deux carrousels (c’est le cas, par exemple, de l’Université catholique de Louvain). Or, la comparaison d’œuvres est essentielle dans la pertinence d’un discours d’historien de l’art. La mémoire visuelle ne suffit pas toujours à saisir toutes le nuances entre deux œuvres ou deux vues d’une même œuvre. Par ailleurs, ces universités n’ont, en général, pas de moyen de projeter autre chose que des diapositives. De plus, certaines universités n’ont pas non plus d’appariteur, ce qui oblige le professeur à faire des allers-retours entre son pupitre et la régie si une diapositive est à l’envers ou si le carrousel s’enraye (c’est le cas de l’UCL).

         La question du passage au numérique se pose donc avec encore plus de pertinence pour ces universités moins équipées que l’Ecole du Louvre. Cependant, même avec deux carrousels, l’usage des diapositives présente des limites pour l’enseignement de l’histoire de l’art.

         D’une part, il est impossible d’improviser. Le cours doit se dérouler du début jusqu’à la fin tel que le professeur l’avait préparé. Si une question est posée dont la réponse nécessite la projection d’une image différente (autre vue d’un même objet, ou objet différent pour comparer), le professeur est obligé de reporter son explication au cours suivant. Malheureusement, il peut oublier et la question peut rester sans réponse.

         Par ailleurs, certaines images sont très difficiles à photographier, et donc à projeter, en entier. C’est le cas, par exemple, des reliefs horizontaux très longs (voir le relief d’Ahénobarbus, au Louvre, voir Figure 1), ou très hauts (une obélisque, par exemple). Lorsqu’on tente de les photographier, l’objet apparaît déformé et illisible. Même deux images côte à côte ne rendent pas l’œuvre lisible dans son ensemble.

         On peut également soulever, parmi les limites de la diapositive, la question de la présentation du cinéma et de l’art mobile. En effet l’enseignement de l’histoire de l’art ne peut pas s’arrêter aux seuls objets immobiles, sous prétexte qu’une diapositive ne peut montrer un objet en mouvement. Nous parlons, à partir de la fin du XIXème siècle des débuts du cinéma. Ensuite, au XXème on évoque l’art mobile d’Alexander Calder, mais également l’expansion des happenings, comme les « Actions » de Joseph Beuys. En cours des arts d’Océanie, on nous parle du bruit que font les instruments et les costumes en mouvement lors des cérémonies. Pourtant, nous ne voyons ni n’entendons rien de tout cela, car ce serait trop compliqué, et nous perdrions trop de temps à changer de projecteur et à démarrer la séquence audiovisuelle, pour revenir, deux minutes plus tard, aux diapositives.

         Pour l’instant, l’enseignement de l’histoire de l’art à l’Ecole du Louvre se termine au XXème siècle. Or, déjà au siècle dernier, l’art numérique connaissait un grand succès parmi les artistes. Là aussi, pour le présenter, il faudrait passer au projecteur data et lancer le fichier sur un ordinateur ou un lecteur DVD. Cette forme d’art moderne est omise de l’enseignement car trop compliquée à montrer.

         Ce problème de manque de souplesse due à la mixité des supports est évoqué depuis quelques années (deux ans, selon l’étude de S. Livin et A. Verwaerde). En effet, certains professeurs disposent d’images numériques ou de clips vidéo personnels. S’ils souhaitent les montrer à leurs élèves en cours, cela implique qu’ils préviennent l’appariteur et que celui-ci fasse le transfert de projecteur en cours de présentation. Cela prend toujours du temps. Lorsqu’il n’y a pas d’appariteur en régie, le professeur doit se déplacer lui-même et effectuer les branchements. Notons au passage que l’Ecole du Louvre, contrairement à d’autres institutions d’enseignement d’histoire de l’art, dispose d’ordinateurs relativement récents dans la majorité de ses amphithéâtres, branchés en permanence sur un projecteur data. Il est alors plus simple que le professeur apporte son matériel sur un cédérom ou une clé USB, plutôt que sur son ordinateur portable. Cette solution est fortement encouragée par le responsable des régisseurs de notre école[11].

 

         La difficulté majeure des diapositives réside essentiellement dans l’utilisation-même de l’objet diapositive. En effet, la diapositive est un objet fragile. Des dégradations : jaunissement, la déformation du film, le rayage et la désolidarisation entre le support et le film, sont inévitables. Bien qu’elles soient petites et fines, la conservation des diapositives requiert de l’espace et des conditions particulières de rangement. Dans une diapothèque comme celle de l’Ecole du Louvre, qui conserve plus de quatre cent mille diapositives, un cliché mal rangé est un cliché perdu. Il faut donc du personnel en permanence pour veiller au respect des codes de rangement et de conservation.

         Par ailleurs, pour préparer son cours, le professeur doit venir choisir et retirer se diapositives jusqu’à deux semaines à l’avance. Si une diapositive n’a pas été rendue à temps ou est utilisée par un autre professeur pour un autre cours, elle doit être reproduite. Cela prend du temps et coûte cher. A l’UCL, de nombreux professeurs ont opté pour leur propre diapothèque personnelle[12], pour plus d’autonomie. En outre, surtout si un professeur doit faire une intervention dans une université éloignée, il y a toujours un risque de perte.

         Enfin, après le cours, le professeur ayant utilisé la diapothèque doit aller rendre ses clichés. Il défait ainsi tout le support de son cours jusqu’à l’année suivante, où souvent il reprendra, à peu de chose près, les mêmes clichés.

        

C.     L’information disponible

        

         Il est aujourd’hui impossible pour un historien de l’art, élève ou professeur, de ne pas être tenté par les myriades de bases de données informatiques qui nous proposent un accès direct et gratuit à l’outil principal de nos études : l’image. Certaines sources nous proposent également des informations textuelles, mais nous verrons que cela pose plus de problèmes de fiabilité que la recherche d’images.

         Ces bases de données et banques d’images, Jacques Renard, Directeur de l’Administration générale en parle dès 1993[13] :

 

« Instruments de travail pour une meilleure connaissance du patrimoine, outils de gestion des éléments qui le constituent, moyens de diffusion de l’information auprès du public, les bases de données permettent ainsi aux spécialistes et aux amateurs d’effectuer des recherches sur l’iconographie, la typologie et l’historique d’une œuvre, de consulter en ligne des catalogues bibliographiques et d’accéder aux inventaires réalisés par les services d’archives. […] Associées aux bases de données, des banques d’images, développées récemment par les services de la culture ou avec leur soutien, mettent à disposition de tous des centaines de milliers d’images du patrimoine. »

        

         En 1993, ces informations n’étaient pas encore mises à disposition du grand public français ou international. Le World Wide Web venait d’être créé, il n’y avait que 90 000 internautes dans le monde[14], et World-Net proposait les premiers accès Internet en France. Les efforts du Ministère de l’Education nationale et de la Culture profitaient donc exclusivement aux utilisateurs ayant accès aux différents réseaux internes disposant d’une base de donnée.

         Aujourd’hui, de multiples émanations de ces bases sont accessibles sur Internet et se regroupent en bases beaucoup plus grosses, performantes et conviviales. C’est le cas de la base JOCONDE[15], qui se présente comme le « catalogue des collections des musées de France, en archéologie, beaux-arts, arts décoratifs, ethnologie, histoire, sciences et techniques » ; ou de NARCISSE[16] (Network of Art Research Computer Image SystemS in Europe), la « base documentaire sur les peintures de chevalet du laboratoire de recherche des musées de France ». La future base EROS[17] (European Research Open System) du C2RMF, réunira toutes les informations et les rapports d’analyse en laboratoire sur chaque œuvre étudiée au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France. De même, l’interface de recherche de la base de ART ON DEMAND (AOD)[18], puise dans les fonds du C2RMF, de la RMN (Réunion des Musées nationaux), du WEB et de Alinari. Et il faut encore citer toutes les bases répertoriées sur le site de documentation du Ministère de la Culture[19].

         La France était plutôt en avance sur les autres pays en ce qui concerne la numérisation et la mise en ligne d’informations. Ses bases de données sont aujourd’hui très fournies et seraient presque suffisantes pour illustrer un cours cohérent sur une époque artistique. Néanmoins, il est important de présenter également d’autres collections que celles des musées de France. Les quelques sites suivants, accessibles à tous, présentent des images particulièrement intéressantes pour un professeur ou un élève en histoire de l’art.

         Tout d’abord, nous devons citer les sites de musées dont tout ou partie des collections ont été numérisées et mises ligne, c’est le cas du Getty Museum[20]. Le site insecula.com[21] est également une source précieuse de photographies d’objets présentés dans les musées à travers le monde (en particulier France, Italie, Egypte et Etats-Unis). Certaines bases, plus proche de la JOCONDE française, regroupent les collections d’un pays. C’est le cas du site de l’Institut royal du Patrimoine artistique[22] (KIKIRPA), qui présente « plus de 850.000 clichés, qui couvrent les divers aspects de l'art en Belgique: monuments et sites, sculpture, peinture, peinture murale, textile, orfèvrerie, verre, céramique, documents graphiques, ainsi que l'archéologie, le folklore, les professions anciennes, etc. » Pour l’architecture, le site ArchNet[23] est un exemple de communauté en ligne de partage de photographies d’architecture prises par des architectes, des historiens de l’art et des amateurs. Ce site est particulièrement axé sur l’architecture islamique dans le monde.

         Le site Artcyclopedia[24] présente un moteur de recherche en histoire de l’art, qui va puiser ses informations et ses images sur toutes les sources disponibles en ligne : sites de musées, bases de données, sites personnels, etc. Le but étant de proposer des images numériques de très haute qualité. Citons enfin la fonction « Recherche d’image » dans le moteur de recherche Google[25]. Celle-ci permet de taper un mot clé et de n’avoir en résultat que des vignettes d’images dont le titre comporte le mot clé.

         Cet afflux d’images est d’hors et déjà accessible aux professeurs, et peut-être plus encore aux élèves.

 

D.    Du côté des élèves

        

         Deborah Seid Howes du Metropolitan Museum of Art, dans son essai intitulé « Connecting with classrooms through computers », acte de ichim 1997, remarque que de grandes campagnes d’informatisation des écoles ont été menées depuis le milieu des années 1990[26]. Le but de ces campagnes était d’équiper toutes les écoles en ordinateurs modernes, de connecter toutes les salles de classe à l’Internet, et de former à la fois les élèves et les professeurs à l’utilisation de ces nouvelles technologies. Aux Etats-Unis, on parle du « Technology Literacy Challenge », lancé en 1996 par Bill Clinton. En France[27], ce concept s’est surtout développé à la rentrée scolaire de 1998. En Belgique, un projet semblable est adopté en 1999[28].

         Il est important de noter qu’aujourd’hui ce sont les élèves de ces premières classes informatisées qui sont en université. Deborah Seid Howes fait remarquer que les exigences de ces élèves dans le domaine des technologies de l’information et de la communication (TIC) sont grandes. Ils savent ce que peuvent faire les TIC et ont pris l’habitude de s’en servir. Ces étudiants « attendent d’une information qu’elle reflète des perspectives multiples, quelle soit reliée à des sources originales, et qu’elle génère de nombreuses issues possibles[29]. »

         Donc, que les professeurs utilisent le numérique dans leur cours ou non, les élèves, qui ont été habitués à trouver des informations, sur l’Internet notamment, continueront à utiliser cette source comme premier lieu de recherche.

         Dans la plupart des écoles d’histoire de l’art, en sortant d’un cours, les élèves doivent aller rechercher les clichés projetés lors du cours. Ceci, pendant qu’ils sont encore « frais » dans leur mémoire. Ces clichés serviront lors de leurs révisions. A l’Ecole du Louvre, comme nous l’avons dit, une moyenne de soixante clichés est montrée par cours, dans un amphithéâtre de 600 personnes. Or, notre bibliothèque ne contient pas 600 places assises. Par ailleurs, certains clichés sont rares et n’apparaissent que dans un ou deux livres. Il n’y a pas 600 exemplaires de ces livres. D’où les « embouteillages » pour consulter les livres.

         Ensuite, ces clichés sont photocopiés. Puis ils sont classés dans de gros classeurs, en moyenne un à deux classeurs d’archives par matière. En plus du fait que cela abîme les livres et coûte cher aux élèves, cette grande utilisation de papier n’est pas très écologique.

         Devant cette situation, quelques élèves ont décidé, depuis deux ou trois ans, de se concentrer sur les sources disponibles sur Internet. Ils ont essayé de trouver, sur les sites et les bases de données, un maximum d’images, afin de n’avoir plus qu’une poignée de clichés à trouver dans les livres. Ils enregistrent les images sur leurs disques durs et les classent d’un clic dans des dossiers. Ils peuvent se diviser la liste de clichés à trouver et se communiquer les images par mèl.

         Il existe maintenant un cédérom avec tous les clichés projetés en troisième année de 2001-2002 et 2002-2003. Ce cédérom circule, est largement diffusé dans l’école, et personne ne sait plus qui l’a compilé ni d’où viennent les images. Malheureusement, il comporte des erreurs (d’attribution, de titre, de date, etc.), dont certaines sont assez graves et sa diffusion ne peut plus être arrêtée. C’est le risque que présente un travail précipité, un peu anarchique et presque confidentiel.

         La recherche de clichés est un travail énorme et central dans l’enseignement de l’Ecole du Louvre. Le fait de pouvoir le copier en deux minutes démystifie un peu ce travail. C’est peut-être pour cela que l’existence de ce cédérom était tenue presque secrète, par « respect » envers celui ou celle qui l’a commencé. Cependant, maintenant ce cédérom existe et circule, et il contient des erreurs. Ne faudrait-il pas que les professeurs se le procurent et en corrigent les quelques erreurs, puis le remettent à disposition des élèves ?

         A l’UCL en Belgique et à Stanford[30] aux Etats-Unis, les élèves en histoire de l’art ont à leur disposition un cédérom avec tous les clichés à connaître pour les examens. Dans ces cas, l’initiative est venue des enseignants. A l’Ecole du Louvre, les professeurs sont réticents à l’idée de fournir un syllabus ou le plan de leur cours aux élèves. On nous dit que cela ne correspond pas à l’optique de l’école et à sa méthode d’enseignement, que les élèves doivent chercher les 5000 clichés par an dans les livres, afin de se familiariser avec d’autres reproductions et d’autres informations non données en cours. Cette approche, respectable, est rendue caduque par la possibilité de recherche et de reproduction de l’image numérique.

         Enfin, une autre preuve de la présence du numérique et de sa diffusion à l’Ecole du Louvre, et probablement dans les autres écoles n’utilisant pas les syllabus ou les recueils « officiels » de clichés : certains élèves viennent en cours avec des appareils photo numériques, et photographient systématiquement tous les clichés montrés. Accompagné d’un enregistrement magnétique ou numérique audio, ces photos représentent un outil précieux pour les révisions. Le tout existe également sur cédérom. Le microphone dans un cours est maintenant toléré, mais l’appareil photo numérique ne l’est pas. En 2003, il a suffit d’un flash non désactivé pour que l’appariteur vienne confisquer l’appareil. Mais il n’en a vu qu’un.

         Précisons tout de même que, bien que quelques cours dactylographiés (mot à mot, d’après une cassette audio) et quelques pages scannées de livres de référence aient été ajoutées à ces deux cédéroms, ils ne suffisent pas à réviser les examens de l’Ecole du Louvre, pour lesquels on nous demande un savoir encyclopédique. Le support numérique tel qu’il existe actuellement ne remplace pas les livres ni le travail personnel en histoire de l’art[31].

         Maintenant, ces cédéroms circulent en dehors du cercle des étudiants de l’Ecole du Louvre. De nombreux étudiants d’autres universités parisiennes en connaissent l’existence et beaucoup s’en sont procuré une copie. La rivalité entre l’EDL et les universités n’est pas un secret. Aujourd’hui tous les étudiants d’histoire de l’art ont accès au contenu presqu’intégral des cours de l’Ecole, sans que leur origine n’y figure. Que se passerait-il si les professeurs d’histoire de l’art d’une de ces universités décidaient de faire de ce cédérom leur syllabus numérique pour la rentrée 2004 ?

 

         Les erreurs que nous avons pu relever dans la légende des images du premier cédérom de troisième année que nous évoquions, étaient généralement la répétition d’erreurs à la source. En effet, il y a aujourd’hui deux problèmes dans ces sources numériques, selon leur nature :

         Les bases de données reconnues par les grandes instances d’histoire de l’art (musées, écoles et ministères de la culture) telles que Art on demand, Joconde, Getty, Narcisse, KIKIRPA, etc., contiennent parfois de erreurs, mais leur réputation est telle que l’élève préférera copier cette erreur que remettre en question la source.

         Si constituer une banque d’informations colossale comme, par exemple, l’idéal EROS du C2RMF, est un projet humaniste, il requiert d’énormes moyens financiers et humains. Malheureusement, la saisie des informations se fait parfois un peu trop vite, et des erreurs apparaissent. Les personnes qui saisissent ne sont généralement pas des spécialistes[32], ils ne peuvent donc pas repérer leur erreur immédiatement. Des milliers de fiches sont remplies et mises en ligne chaque jour, à la fin de la journée, il est trop tard pour tout relire. L’erreur demeurera jusqu’à ce qu’un spécialiste, un jour, consulte cette fiche et rapporte l’erreur.

         Quant aux sites personnels, comme le fait remarquer Michael Greenhalgh, professeur d’histoire de l’art à la Australian National University de Canberra : « self-publishing means academic standards – if any – are self-imposed[33]. » Bien qu’on trouve beaucoup d’informations intéressantes, il arrive que ces pages contiennent des aberrations. Cependant, l’utilisateur est beaucoup plus critique et attentif face à ces sources que face aux bases de données plus « officielles » évoquées précédemment.

         Par ailleurs, sur les sites personnels, nous ne connaissons pas le degré d’originalité et de fiabilité des informations proposées. En effet, d’où proviennent les images et le texte ? Les sources ne sont généralement pas citées. Or le texte, comme les images, ont pu être modifiées. C’est ce que Petra Klara Gamke, professeur assistant à l’Institut d’Histoire de l’Art de Heidelberg, en Allemagne, appelle le problème de la « digipulation[34] », ou la manipulation de données digitales. Le danger de cette manipulation est qu’elle est indécelable pour l’instant. Ce texte date de 2000, mais c’est encore en grande partie vrai aujourd’hui. De plus, elle n’est pas nécessairement voulue par l’auteur : le simple fait de changer le format d’une image ou d’un texte est une digipulation. Mme Gamke avance que la profusion d’images et de textes « digipulisés » sur Internet n’est pas due à la malhonnêteté des créateurs de pages personnelles, mais à la facilité de manipuler ces données. Elle affirme que le sentiment d’infraction diminue proportionnellement à la difficulté de l’infraction. Il est aujourd’hui assez facile d’ajouter un personnage aux Noces de Cana de Véronèse, avec un bon logiciel de montage photographique (voir Figure 2). Or, pour peu qu’on ne change pas le titre du fichier, cela peut prêter à confusion. Un utilisateur de Google Image cherchant le Véronèse trouverait le fichier manipulé parmi les résultats de sa recherche.

         Un autre inconvénient de ces sources numériques, est que, pour l’instant, il est trop facile de copier un fichier sur son disque dur sans en marquer l’origine. Ainsi, si un étudiant, ou un professeur, trouve un article dont un seul paragraphe l’intéresse, il peut en faire un copier/coller sur un traitement de texte, en pensant l’utiliser un jour. Malheureusement, en faisant cela, il perd la référence de ce texte, qui devient inexploitable. Ce problème, qui se posait déjà avec les photocopies, est actuellement réglé de la même façon : on copie tout l’article, avec le nom de l’auteur, et on « colle » l’adresse URL de la source sur le même document. Mais cela prend beaucoup de temps, et n’est pas entré dans les mœurs des utilisateurs.

 

 

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 II.                  L’utilisation du numérique pour la présentation d’un cours d’histoire générale de l’art


A.     L’image numérique

        

         Lorsqu’on parle d’utilisation du numérique dans un cours d’histoire de l’art, la première chose qui nous vient à l’esprit est la question des images numériques. Dans un mèl du 15 mars 2004, Dominique de Font-Réaulx, professeur d’histoire de l’art du XIXème siècle en premier cycle de l’Ecole du Louvre, confiait[35] :

 

« Oui, j'ai déjà caressé l'idée de présenter mon cours grâce à Power Point mais sans aller beaucoup plus loin que l'idée. A moitié par paresse car la Photothèque de l'Ecole est très bien organisée et fournit vite des images, à moitié par peur de l'inconnu. Je dirais que pour sauter le pas, il me faudrait une assistance de l'Ecole et surtout la certitude que cela fonctionne. J'ai déjà vu quelques ratés pour des intervenants extérieurs. La diapo c'est un peu ringard (et moins bien comme image) mais c'est assez souple et cela marche toujours. »

 

         Ce mèl résume les questions les plus fréquentes à propos de l’utilisation d’images numériques dans un cours d’histoire de l’art. Ce sont aussi les questions relevées par l’étude menée par S. Livin et A. Verwaerde[36] à l’UCL.

1.     Quel logiciel choisir ?

2.     Quels sont les avantages d’une photothèque numérique par rapport à une diapothèque classique ?

3.     Qui pourrait m’aider ?

4.     Cela fonctionne-t-il vraiment partout ?

5.     Peut-on obtenir la même qualité de projection qu’avec des diapositives ?

 

         Voyons tout d’abord en quoi l’image numérique peut supplanter l’image diapositive. Nous avons évoqué précédemment quelques problèmes liés à l’utilisation de diapositives : la matérialité, la fragilité, le format limité par la standardisation des appareils, la non-ubiquité de l’objet diapositive.

         Avec les images numériques, ces problèmes disparaissent. L’image numérique est un fichier digital binaire[37]. Ce fichier a un support, mais est lui-même immatériel. Le support peut être un disque dur, une bande magnétique, un cédérom, un DVD, une clé USB, etc. Sur les bases de données qui se construisent actuellement en France, les photographies numériques des œuvres existent en au moins deux définitions : la vignette (thumbnail), et l’image de très haute définition, généralement en TIFF[38]. Cette dernière peut faire jusqu’à 500Mb, mais uniquement pour des très grands objets. Or, le marché actuel propose des supports à capacités de plus en plus grandes pour une taille physique de plus en plus réduite. Le prix de ces supports baisse également très fortement. Actuellement, le support privilégié semble être le DVD, car il peut contenir, en théorie, jusqu’à 4,7Go, et ne prend pas plus de place qu’un cédérom, qui ne contient, au maximum, que 800Mo.

         Ces supports prennent moins de place que les diapositives. Cependant, leur conservation dans le temps demeure inconnue. Nous savons que les CD « gold » demeurent lisibles plus longtemps que les cédéroms ordinaires. Mais les DVD « gold » ne sont pas encore disponibles sur le marché. Les recherches sont en cours pour le développement d’un nouveau support dans une matière plus connue, le verre, par exemple[39]. Contrairement aux autres supports magnétiques et optiques disponibles actuellement, les conditions de conservation du verre sont bien connues : il est parfaitement stable dans le temps, si on le préserve d’une humidité trop importante (supérieure à 35% d’humidité relative).

         Néanmoins, à la grande différence des diapositives, la reproduction de l’image numérique est très facile. Cela ne coûte rien, est rapide, et l’image résultante est identique à l’originale. Ainsi, bien que nous sachions que les supports magnétiques et optiques ont une durée de vie limitée, ils sont tout de même utilisés actuellement, car il suffit de transférer le contenu sur un nouveau support régulièrement (tous les trois ans, par exemple) pour que les données soient conservées.

         Il est fort probable que dans 50 ans il soit difficile de trouver un appareil capable de lire des CD ou des DVD actuels, tandis que les diapositives seront toujours lisibles, puisqu’il suffit d’une source de lumière. Mais on peut espérer, avec cette facilité de transfert de données, que les documentalistes actualiseront le support lorsque cela sera nécessaire.

         Par ailleurs, les images numériques sont conservées avec un certain nombre d’informations textuelles « liées » au fichier (nous verrons plus tard que la standardisation de ce « lien » pose problème). Actuellement, les diapositives ne sont dotées que de quelques gribouillis sur leur cadre (les étiquettes imprimées ne sont utilisées que depuis peu), indiquant, dans une écriture le plus petite possible, le titre, l’artiste, le lieu de conservation et le nom de l’auteur de la photo. Un numéro renvoie à une petite fiche cartonnée dans un fichier de bibliothèque « à l’ancienne ». Cette fiche, où figurent quelques informations complémentaires, est souvent manuscrite et pas beaucoup plus lisible que le cadre de la diapositive[40]. Les images numériques peuvent, elles, comporter des indications concernant leur date de création, leurs dimensions, leur matière, leur lieu de découverte (pour un site archéologique, notamment), la date de leur découverte, etc. Ce « lien » fixe permet d’éviter toute erreur d’attribution et de perte d’informations telles qu’il en existe avec les diapositives. Il permet aussi une mise à jour régulière de ces informations, sans altération de l’image elle-même.

         En outre, certains restaurateurs ont décidé récemment de publier leurs rapports d’intervention exclusivement en format numérique[41]. Le C2RMF n’ayant pas le temps de transférer toutes les images numériques en diapositives ou de les imprimer, beaucoup de photographies d’analyses ne sont maintenant disponibles qu’en numérique. Cela va dans le même sens que l’ambition du C2RMF de numériser tous les rapports de toutes les interventions faites par le laboratoire, afin de tout regrouper sur la base universelle EROS.

 

         Si les laboratoires des musées de France ont pris cette décision, c’est qu’ils croient en la grande qualité des images numériques, au moins égale à celle des diapositives. Mme de Font-Réaulx estime, dans son mèl, que cette qualité est même supérieure à celle des diapositives argentiques. Mais cela n’est pas l’avis de tous les professionnels[42]. Quant à Marleen Hoover, professeur d’histoire de l’art à San Antonio College, et Joan Fabian, spécialiste des ressources image au Visual arts and Technology Center de la même institution, elles remarquent que, bien que les images numériques aient une qualité supérieure aux diapositives classiques sur un petit écran, elles perdent parfois de leur qualité lorsqu’elles sont projetées[43] sur grand écran. Elles ont effectivement une tendance à pixéliser[44], ou leurs couleurs à se modifier.

         Nous avons eu l’occasion de remarquer ces déformations lors du premier cours « numérique » de l’Ecole du Louvre. Le premier cliché du premier cours de M. Brême[45] en art du XVIIIème, fut la Fête à Rambouillet (ou L’île d’amour, 1770) de Jean-Honoré Fragonard[46]. Les couleurs paraissaient criardes, le vert et le rose étaient presque fluorescents. Les commentaires des élèves étaient plutôt hostiles au numérique. Ainsi, alors que personne ne se plaignait de l’aspect jauni des œuvres projetées sur des diapositives, les voix s’élevaient contre les images numériques lorsque le contraste était un peu trop accentué.

         Il est cependant intéressant de noter qu’à la dernière séance de M. Brême, les élèves semblaient avoir oublié qu’il s’agissait d’images numériques. Nous pouvons nous interroger ici sur l’adaptation de notre regard aux défauts présentés par les différents modes de projection. Nous étions habitués à corriger le jaunissement et l’appauvrissement du contraste des images diapositives. Nous avions calculé, à force de voir les œuvres « en vrai » dans les salles des musées, le degré de déformation, ou notre regard le compensait automatiquement. Donc, lorsque nous avons été confrontés à de nouvelles déformations engendrées par la projection numérique, nous avons, dans un premier temps été surpris. Puis, au bout des huit séances, notre œil s’était habitué et nous compensions, comme avec les diapositives.

         Néanmoins, précisons que les déformations des images numériques sont généralement dues à la qualité du projecteur data. Il est très facile de corriger une image scannée, d’en modifier le contraste, de rétablir les couleurs. Même lorsque celle-ci provient d’une diapositive de mauvaise qualité, l’image peut être « récupérée ». Les très bons projecteurs data coûtent encore cher : 1500€ en moyenne, contre 1200€ pour un projecteur à diapositives[47]. Mais ce prix a déjà considérablement baissé depuis une dizaine d’années et nous pouvons espérer qu’il baisse encore. En outre, nous avons vu que pour faire un bon cours d’HGA il fallait au moins deux projecteurs à diapositives, en numérique il n’en faudrait qu’un. Cela devrait pousser les écoles à encourager leurs enseignants à passer au numérique. Mais, comme le fait remarquer Mme de Font-Réaulx, ce n’est pas encore une priorité pour l’Ecole du Louvre, qui se repose encore sur sa photothèque.

         Cette dernière remarque soulève la question de la mise à disposition des images. Cela rejoint la deuxième interrogation du professeur d’histoire de l’art : quels sont les avantages d’une photothèque numérique par rapport à une diapothèque classique ?

 

B.     La mise à disposition et la gestion des images numériques

        

         Aujourd’hui, on peut imaginer que beaucoup de diapothèques sont passées au fichier numérique. Ce système permet notamment de proposer plus de champs d’interrogation. Et une référence de diapositive peut apparaître en réponse à plusieurs questions. Nous n’allons pas faire l’anthologie du système de fichier numérique, qui existe depuis fort longtemps pour les bibliothèques. Cependant, une fois que l’utilisateur a la référence qu’il souhaite, il doit aller chercher la diapositive, puis la fiche associée. Or, la diapositive peut avoir été empruntée, déplacée, esquintée ou perdue, de même que sa fiche. Sur une banque d’images numériques, la réponse à une interrogation est l’image elle-même, toujours dans le même état. Elle se tient à disposition de l’utilisateur, ainsi que les données qui l’accompagnent. Ici l’accès au cliché ne dépend pas de l’utilisateur précédent. On pourrait dire que « l’original » ne se déplace jamais, l’utilisateur n’emprunte qu’une copie.

         Cela nous emmène au point positif suivant de l’image numérique : l’ubiquité et la simultanéité d’utilisation des données digitales. Ce sont deux concept développés par Petra Klara Gamke, dans sa conférence intitulée « You have to become a feature of the landscape.

Ubiquity in the era of digital imagery[48]» Une fois un fichier mis en réseau, il est accessible par tous les utilisateurs de ce même réseau. Deux utilisateurs peuvent y avoir accès en même temps (nous ne parlons ici que de fichiers accessible strictement en consultation, c’est-à-dire, non modifiables par l’utilisateur) et quelque soit leur point d’accès. Ce réseau peut être réservé à un usage interne, ou peut-être accessible via une connexion Internet. Il peut éventuellement être protégé par un nom d’utilisateur et un mot de passe. Un professeur peut alors préparer son portefeuille d’images depuis n’importe quel ordinateur. Il est sûr d’avoir les clichés qu’il souhaite. Il peut ensuite les enregistrer sur un support personnel, ou, si le système le permet, les laisser dans un dossier en ligne.

         Le concept de dossier, ou de portefeuille d’images est un autre point intéressant de l’informatique. On a vu que l’utilisateur d’une banque d’images numériques n’empruntait qu’une copie de ce que l’on a appelé « l’original ». En réalité, il fait plus que l’emprunter dans la mesure où c’est une copie et la « rendre » équivaudrait à « l’effacer ». Or, s’il choisit de s’en servir dans le strict cadre de la légalité, le professeur peut conserver ces images. Donc, contrairement à la série diapositives que le professeur doit aller rendre à la fin de son cours, et qu’il devra reconstituer à peu de chose prêt à l’identique l’année suivante, ici le professeur peut conserver sa série de clichés. L’année suivante, il n’aura qu’à rouvrir son dossier informatique et éditer la liste si nécessaire. Cela lui prendra beaucoup moins de temps que de trouver et retirer toutes les diapositives à nouveau.

         De plus, une fois sur son ordinateur, que l’on ait un Macintosh ou un PC tournant sous Windows XP, les images apparaissent sous forme de vignette dans leur dossier. Cela permet de les manipuler comme des diapositives sur une table lumineuse. Il n’est plus nécessaire d’ouvrir chaque fichier pour en connaître le contenu (ce qui était le cas avant Windows XP, à moins d’installer un logiciel spécialisé).

         Nous en venons à une autre question soulevée par les professeurs d’histoire de l’art : quel logiciel choisir ? En effet, une fois les clichés choisis et enregistrés sur un support (nous prendrons, pour simplifier, le cas d’un disque dur d’ordinateur portable), le professeur doit déterminer comment il souhaite projeter son cours.  Plusieurs solutions existent.

 

C.     La présentation d’un cours numérique

        

         La plus simple consiste en un diaporama de toutes les images contenues dans un fichier, dans l’ordre où elles sont rangées. C’est une fonction que proposent de nombreux logiciels de gestion d’images, dont de nombreux gratuits tels que Fresh View[49] et DVD PictureShow[50]. Cette fonction existe également par défaut sur Windows XP, c’est cette application qu’utilisait M. Brême à l’Ecole du Louvre pour son cours d’histoire de l’art du XVIIIème siècle en 2002-2003. Les images apparaissent en plein écran. On peut choisir de passer à la suivante par un clic ou de configurer une minuterie automatique. On peut également choisir d’ajuster les images à la taille de l’écran ou de les laisser à leur taille (le plus souvent inférieure à la taille de l’écran), en son centre.

         La présentation est donc plus claire, propre et présente aucun changement drastique par rapport à l’usage de la diapositive. L’avantage majeur est qu’il peut choisir de présenter une même image plusieurs fois (une carte géographique, ou une œuvre de référence, par exemple), il suffit pour cela de la faire figurer plus d’une fois dans la liste du diaporama. L’inconvénient est qu’il ne peut pas comparer deux images. A moins d’avoir, en plus, quelques diapositives à projeter avec un second projecteur.

         Pour un peu plus de liberté et surtout pour présenter plus qu’une simple image à la fois, nous disposons de logiciels classiques de présentation. Le plus répandu est Microsoft PowerPoint, mais il en existe aussi une version Open Office (gratuite) : Impress. Ces logiciels permettent d’élaborer des diaporamas multimédia. Vous trouverez en annexe (Figure 3) quelques extraits d’une présentation faite pour un exposé en cours d’espagnol[51] sur l’art islamique et ses influences en Espagne.

         Nous l’avons vu, à l’Ecole du Louvre, l’élève ne reçoit pas de liste avec les légendes des clichés à retrouver et à connaître pour l’examen final. Par conséquent, pendant le cours, l’élève doit faire très attention à noter chaque légende de chaque cliché. S’il a mal entendu, ou s’il se trompe dans l’orthographe, il a peu de chances de retrouver ce cliché dans les sources à sa disposition. Cela arrive assez souvent, surtout lorsque le professeur accélère à la fin d’un cours et qu’il oublie d’épeler les noms compliqués. Dans ce cas, l’élève se concentre uniquement sur ce que le professeur dit, et ne regarde presque plus les images. Avec un logiciel tel que PowerPoint ou Impress, il est possible de faire des présentations très simples, qui intègrent une ou plusieurs images et leurs légendes sur une même « diapositive » (nom donné à chaque unité de la présentation, la séquence entière étant un « diaporama »). L’élève peut ainsi lire le cartel de l’œuvre tout en regardant l’image. De plus, contrairement à la proposition précédente, ici le professeur peut facilement comparer plusieurs images à la fois. On peut également intégrer des diapositives avec du texte simple. Sur la présentation annexée, les titres des différentes parties de l’exposé apparaissent clairement. Par ailleurs, la couleur de son fond peut être modifiée. Cela peut ressembler à un « gadget »,  et pourtant, cela permet de mettre en valeur certaines œuvres. Ici, le fond de la présentation est noir, et le texte ivoire. Projetées, les images apparaissaient comme des diapositives « flottantes ».

         L’utilisation de ces logiciels est simple et instinctive. Il suffit de « tirer et déposer » (drag and drop) les clichés sur la feuille de diapositive, et d’insérer les légendes à l’aide d’un carré de zone texte. Il existe également des dispositions toutes prêtes (layouts) avez des zones d’image et des zones de texte. Une fois toutes les images sur le disque dur et le plan du cours préparé, une présentation de cinquante diapositives prend au grand maximum deux heures à arranger. Notons cependant que cette présentation pèse plus de 6Mo, et les images ne sont pas de la meilleure qualité. Si l’on souhaite la transférer à un autre ordinateur, il faut prévoir un support conséquent.

         Mais PowerPoint et Impress sont des logiciels de grand public, et surtout destinés aux présentations de démonstrations dans le domaine des sciences, des finances, du marketing, etc. Voyons maintenant une proposition de logiciel développé par un professeur d’histoire de l’art à l’Université Catholique de Louvain. Voici ce qu’on peut lire sur l’édition de mars 2003 de la revue Résonances, bulletin mensuel d’information pédagogique de l’UCL :

 

      Modulo, produit développé par Michel Lefftz à l’IPM [Institut de pédagogie universitaire et des multimédia], permet la réalisation aisée de supports de cours multimédias (images fixes, vidéos, animations, schémas, textes, sons) susceptibles  d’être projetés en auditoire ou consultés individuellement via une duplication sur cédérom.

      Diverses fonctionnalités spécifiques et puissantes ont été développées pour mieux répondre aux besoins des enseignants, telles que :

§    l’affichage d’images de très grande dimension et de haute résolution (mode zoom),

§    la comparaison d’images fixes ou animées entres elles,

§    la mise en relation étroite du texte et de l’image,

§    la fonction d’affichage /masquage des légendes,

§    l’affichage de consignes, de textes explicatifs ou théoriques en relation ou en complémentarité avec les données présentes à l’écran,

§    le stockage de médias de réserve à destination de l’étudiant au sein du même support de cours.

§    l’utilisation d’espaces d’affichage de notes «en direct» (dessins au tableau noir virtuel, Post-it).

      L’utilisation qui se fait en mode local (cédérom) peut être combinée avec un accès à Internet, via des mots hyperliens activant automatiquement le butineur de l’utilisateur.

      L’utilisation de Modulo ne nécessite pas de compétences particulières en informatique et il est donc particulièrement adapté aux enseignants qui utilisent la diapositive ou la vidéo dans leurs cours et souhaitent passer au multimédia.

      Modulo est développé sous Director 8.5 (Macromedia) et nécessite l’acquisition d’une licence de ce logiciel pour bénéficier de toutes les fonctionnalités de l’outil (licence Education UCL à environ 250 euros).

 

         Il est important de noter que Modulo a été créé par un professeur d’histoire de l’art, mais surtout par un ancien élève, qui a pris l’initiative d’adapter les nouvelles technologies pour palier les manques générés par les diapositives argentiques. Modulo (voir Figures 4 et 5) est un logiciel complet. Les présentations de base[52] sont semblables à une présentation sous PowerPoint, avec une ou plusieurs images accompagnées ou non de légendes. La différence pour l’utilisateur est qu’il est obligé d’utiliser une disposition prédéfinie des objets. L’utilisation peut sembler moins conviviale, mais elle est tout de même simple. Selon M. Lefftz[53], une formation de deux ou trois heures suffit à un professeur pour maîtriser l’outil suffisamment pour faire une présentation tout à fait convenable. M. de Koninck a suivi cette formation, et sa présentation était très réussie.

         Par ailleurs, le format de Modulo présente un avantage : Modulo transforme les séquences en exécutables, lisibles soit sur PC soit sur Mac, mais ne requerrant aucun autre logiciel installé. En revanche, si l’on veut éditer une séquence, il faut avoir Macromedia Director.

         Malheureusement, cet outil n’est développé que par une personne, dont ce n’est pas l’activité principale. En effet, M. Lefftz distribue déjà une version β de Modulo, sous une licence Open Source, mais il regrette que son logiciel ne soit pas plus souple et qu’il contienne encore quelques bogues.  Pour l’instant, l’application se développe au fur et à mesure de ses besoins, et de ceux des cinq utilisateurs licenciés. On peut imaginer qu’un jour le développement de cet outil soit confié à une cellule spécialisée, et qu’il soit diffusé plus largement dans le milieu des enseignants en histoire de l’art.

         Nous avons vu comment présenter un cours, grâce à des logiciels performants, capables, sur une diapositive, de présenter tous types de fichiers. En effet, pour l’instant nous n’avons parlé que des défauts des diapositives que les images numériques n’ont pas. Voyons maintenant les avantages que présentent, non seulement les images sinon tout le contenu numérique disponible pour un cours d’HGA.

 

D.    L’offre multimédia

 

         Tout d’abord, comme nous l’avions évoqué au sujet de la qualité des clichés, il est facile de retoucher une image sur son ordinateur. Le logiciel le plus répandu pour cela est Adobe PhotoShop. Ce logiciel coûte cher, mais il en existe plusieurs versions Open Source (gratuites), dont The Gimp[54]. La maîtrise complète de ces outils demande un peu de temps, mais apprendre à en faire un usage simple prend une heure. Le professeur peut, par exemple,  recadrer une image ou corriger le contraste et la luminosité. Grâce au concept de « calque », il pourra également ajouter des éléments à l’image, sans changer l’image elle-même, respectant ainsi les droits d’auteur.

         En effet, imaginons un site archéologique. Pour la présentation des photographies, il est toujours intéressant d’avoir un repère d’échelle. Si cette échelle n’apparaît pas clairement, l’utilisateur de PhotoShop ou The Gimp peut aisément en créer une sur un calque, qu’il placera ensuite sur l’image originale. Ce calque peut être déplacé ou supprimé à sa guise. Cela peut également être très utile pour présenter les différentes époques d’occupation du site. On peut choisir de faire ressortir certaines zones en les coloriant de différentes couleurs. On peut ici utiliser plusieurs calques, et les retirer au fur et à mesure du discours. Cette idée est soulevée par M. Laffineur, professeur à l’Université de Liège[55], qui prend comme exemple les différentes étapes d’élaboration de l’arche de Constantin, à Rome (voir Figure 6). Les calques sont ici placés sur un schéma, mais l’on peut imaginer la même procédure sur une photographie.

         Les calques peuvent également permettre d’ajouter une légende sur un cliché, grâce à une zone texte,  on enregistre ensuite en format d’image. Cela permet de revenir à un diaporama simple, sans avoir à passer par un logiciel de présentation.

         Avec PhotoShop et ses semblables, et bien d’autres beaucoup plus simples encore, il est également possible de recadrer un cliché pour n’en voir qu’un détail. A partir d’une image scannée en très haute définition, l’utilisateur peut n’enregistrer, sous un autre fichier, qu’une partie de cette image. Par exemple, cela permet parfois d’attirer l’attention sur un détail, ou de mieux faire comprendre une technique. Les diapositives de détails existent, mais il n’y a pas forcément tous les détails que le professeur souhaite présenter. Avec le numérique, cela prend moins d’une minute de créer un nouveau cliché et ne coûte rien financièrement.

         Modulo a une fonction semblable mais beaucoup plus « directe ». L’idée est de montrer tout d’abord une vue d’ensemble de l’objet. Puis, en partant d’une image en très haute définition (plus grande que la fenêtre) du même objet, l’utilisateur peut déplacer cette image dans le cadre. Nous voyons, en Figure 4, l’exemple du visage d’une statue de la Cathédrale de Bruxelles, où l’on distingue bien les traces d’outils. Ici l’on voit bien la différence de traitement entre les yeux, la peau et la pilosité.

         Pour M. Lefftz, cette fonction de Modulo est comparable à un zoom, à condition de montrer une vue d’ensemble au départ. D’autres logiciels permettent de zoomer de façon plus dynamique sur des images. Malheureusement, cela n’existe pas encore sur les logiciels de présentation cités plus haut. Si l’on veut avoir la possibilité de zoomer sur un cliché lors d’un cours, il faut utiliser un logiciel de diaporama photo telle que l’application « Aperçu des images et des télécopies Windows » (gratuit avec Windows XP[56]) ou Zoom Studio 2[57] (shareware : gratuit à l’essai). Ou alors, il faut posséder un projecteur data récent, car certains ont la fonction zoom intégrée, à laquelle on peut accéder, et que l’on peut diriger (à l’aide de flèches) à partir de la télécommande.

        

         Si zoomer équivaut à un déplacement en profondeur, le numérique permet aussi de se déplacer sur un plan vertical. Nous l’avons vu sous Modulo, si l’image dépasse du cadre, on peut la faire bouger à l’intérieur. D’autres logiciels proposent de faire défiler l’image verticalement ou horizontalement. Cela est particulièrement précieux pour la présentation d’objets très longs, impossibles à photographier sur une diapositive de 35mm, comme nous l’avions fait remarquer en première partie.

         La majorité des appareils photo numériques proposent aujourd’hui une fonction « panorama ». Cette fonction permet de prendre entre trois et six photographies et de les mettre bout à bout. Au-delà de ce qui est proposé par ces appareils, il est possible de créer un environnement cylindrique (360°) ou équirectangulaire (360° x 180°), notamment avec Apple QuickTime VR[58] (et les outils PTMac, PanoPost, Cubic Converter, etc). Le concept d’image panoramique, particulièrement défendu par Michael Greenhalgh[59], peut être utile pour présenter un relief comme ceux évoqués en première partie, mais également pour présenter de l’architecture et l’urbanisation. Voici l’exemple de la Piazza del Popolo[60] à Rome (voir Figure 7), panoramique photographié et « suturé » (stitched) par M. Greenhalgh. Le professeur peut se déplacer sur cette image horizontalement, présentant chaque monument sans le sortir de son contexte. Ici l’image est « plate », elle peut être montrée avec n’importe quel logiciel de diaporama. QuickTime VR permettrait de relier les deux bouts. Il faudrait alors utiliser l’application QTVR pour ouvrir l’image. Mais ceci peut se faire dans une diapositive de présentation sous PowerPoint, Impress ou Modulo.

         Comme le fait remarquer M. Greenhalgh[61], avec ces images panoramiques, il est possible d’attribuer un lien hypertexte à chaque zone. On peut ainsi imaginer que l’image serve de « nœud » dans la présentation. Si l’on reprend l’exemple du panorama de la Piazza del Popolo, on aurait un lien hypertexte sur les zones de : 1) l'obélisque et les fontaines ; 2) Santa Maria del Popolo ; 3) la Porta del Popolo ; 4) Santa Maria dei Miracoli ; 5) Santa Maria in Montesanto. Le professeur souhaitant présenter ces monuments l’un après l’autre, pourrait d’abord cliquer sur le premier, ce qui le mènerait à une série de vues de l’obélisque et des fontaines. A la dernière vue, il reviendrait au panorama, se déplacerait sur l’image, puis « entrerait » dans Santa Maria del Popolo. S’en suivrait une série de clichés pris à l’extérieur et à l’intérieur de l’église, peut-être quelques images de bâtiments comparables. Puis, on en ressortirait, pour contempler en détail là Porta del Popolo. Avec cette méthode, les élèves ont une bonne idée de l’emplacement des bâtiments les uns par rapport aux autres. Cela peut être important, notamment à Rome, où il est important de distinguer les grandes campagnes d’urbanisme et d’être conscient que lorsque Le Bernin, par exemple, dessinait une place, certains bâtiments y figuraient déjà. C’est le cas ici de Santa Maria del Popolo, construite au XVème siècle.

         Ici ce système de carrousel numérique transversal est utilisé en architecture, mais il peut également être utilisé pour tout autre objet. C’est l’idée que Michel Lefftz a développée dans Modulo. Pour certains tableaux particulièrement riches en détails, par exemple, il est possible d’introduire dans une présentation linéaire, une série d’éléments transversaux. On peut alors cliquer sur la barre d’outil et accéder à d’autres images du même objet, à des textes liés à ce tableau, et, pourquoi pas, à des séquences audio et vidéo. Cela présente un énorme avantage : la possibilité d’improviser. En effet, les éléments sont là, à disposition de l’enseignant. Mais si celui-ci juge qu’il est en retard sur son programme, il peut choisir de ne pas montrer le carrousel transversal. Si, au contraire, un élève pose une question portant sur un détail du tableau, il a le matériel pour y répondre.

         De nombreux professeurs de l’UCL ont évoqué le manque de souplesse de la séquence de diapositives argentiques, nécessairement séquentielle[62]. Cette liberté d’improviser est également essentielle pour Joan Fabian[63] de San Antonio College, notamment dans la comparaison de plusieurs images.

 

         Dans les diapositives de PowerPoint, Impress ou Modulo, il est possible de montrer des séquences audiovisuelles, notamment avec QuickTime ou Windows Media Player[64]. Il est même possible d’en présenter plusieurs à la fois, comme nous le voyons ici sur une capture d’écran de Modulo[65]. Comme nous l’évoquions en première partie, cela pourrait servir à montrer des extraits des scènes de film, des automates et autres sculptures mobiles, des sculptures sonores, des happenings, des reportages ethnographiques, des interviews d’artiste, etc.

         On peut également imaginer que ces séquences audiovisuelles soient en direct. Avec l’aide de webcams (caméra vidéo munie ou non d’un microphone, diffusant une image généralement de basse résolution sur Internet), on peut imaginer de voir en direct l’état d’un site archéologique. Par exemple, on peut actuellement voir l’état du site archéologique du Forum impérial à Rome sur Capitolum.org[66]. Ici on peut même contrôler la direction des deux webcams installées sur la terrasse du Palazzo Senatorio.

         Mais les webcams peuvent également permettre de voir et de parler en direct avec des personnes physiquement distantes. On peut imaginer, lors d’un cours ou d’une séance spéciale, de réaliser une interview en direct d’un spécialiste ou d’un artiste. Les élèves pourraient ainsi poser des questions à des personnes qu’ils ne rencontreraient peut-être jamais autrement. L’artiste ou le spécialiste pourrait présenter des objets de son choix, les manipulant devant tout l’amphithéâtre, et à la demande des élèves et du professeur. Pour l’instant, ce système a été développé par le Philadelphia Museum of Art, mais uniquement pour les classes scolaires[67].

         On peut également présenter des modélisations 3D interactives. Cela peut notamment sembler intéressant pour présenter de l’architecture. En présentant un modèle 3D de la mosquée de Cordoue, par exemple, le professeur pourrait illustrer plus clairement les différentes étapes de construction. Ces modélisations sont dites interactives lorsque le professeur peut les faire tourner et faire un zoom.

         Un autre type d’image digitale qu’il faudrait évoquer, même si elle n’a pas d’application directe dans l’enseignement de l’histoire de l’art actuellement, est l’animation. Avec Macromedia Flash[68], il possible de créer de mini clips d’animation interactifs. Cela pourrait notamment servir à illustrer une technique particulière, ou des étapes de construction d’un bâtiment. L’utilisation de Flash n’est pas encore très simple, et demande de la patience et un certain talent. Cependant, une fois ces animations créées, elles pourront être mise à disposition des enseignants (et des élèves) au même titre que les clichés.

 

         Enfin, en histoire de l’art,  un autre domaine (nous avons vu le cinéma et les arts mobiles) est très peu abordé, et ce, encore une fois, probablement pour des raisons techniques : la musique. En effet, c’est encore une question de mixité des supports. Il faudrait, pour faire écouter un morceau de musique, introduire le support dans un lecteur adéquat, brancher ce dernier sur l’installation audio, lorsqu’il y en a une, ce qui peut couper le microphone du professeur, puis tout rebrancher à la fin de la séquence. Pourtant, la musique fait partie des « courants » artistiques. Peut-on parler d’églises médiévales sans faire écouter les chants monastiques, graves et solennels, qui y résonnaient ? Il y a bien une archéologie musicologique, au même titre que l’archéologie architecturale ou anthropologique. Peut-on présenter les salons baroques sans évoquer la musique dynamique et florissante qu’on y jouait ? Avec une séquence numérique, il n’est plus nécessaire d’arrêter le cours pour écouter un morceau, il peut être en fond sonore. Et, comme pour la vidéo, le professeur peut choisir de lancer et d’arrêter la séquence quand il le souhaite, il peut revenir en arrière ou au contraire avancer, sans dépendre de l’appariteur.

 

E.     Dans un futur proche

 

         Nous avons vu les possibilités qu’offrent déjà le numérique pour la présentation d’un cours d’histoire générale de l’art. Voyons maintenant, avec Michael Greenhalgh, quelques propositions pour l’avenir[69] (cette citation n’a pas été traduite car il aurait été difficile de préserver le ton du texte) :

 

« Here are some predictions based on several years experience of using computers, the net and now the web as teaching and learning tools:

§    classrooms will probably survive, because people need people;

§    small portable computers with video, audio etc, and used for uploading material from the web or a bancomat-type machine;

§    lectures delivered using digital images pulled from the web and video-projected into the lecture theatre (as I have been doing for three years);

§    students issued with CD-ROMs of course images, and initial unit documentation; the web is the noticeboard for all augmentations, changes, updates;

§    programs which check that essays have not been downloaded from the web;

§    seminar presentations mounted in advance as web pages;

§    theses presented on CD-ROM with multimedia where appropriate (NB I have a 1994 Geology PhD from Stanford submitted this way;

§    computer monitors quaint and exclusive, very like the standard "renaissance window"; replaced by wall-size right-angled screens offering virtual reality, it is possible that VRML and associated technologies will indeed win in the classroom. always assuming they become much easier to build and "fit out" with hotspots and links;

§    stereo glasses for the study of sculpture, bas-relief and architecture? after all, the Walkman looked funny when introduced;

§    conceivably, robot cameras at important sites, controlled from the lectern or by individual students;  »

 

         Ce texte a été écrit en 2000. Notons que quelques points ont déjà été réalisés dans certaines universités : les cours entièrement numériques, le cédérom distribué aux élèves (nous en reparlerons en dernière partie), les webcams contrôlables à distance par le professeur, et cette année, pour la première fois, les élèves de l’Ecole du Louvre sont priés de rendre une copie numérique de leur mémoire en plus de la copie papier.

         Monsieur Greenhalgh parle de stéréo imagerie, ou d’images stéréoscopiques. Il présente sur son site quelques exemples de photographies à regarder avec des lunettes à verres rouge et bleu (voir Figure 8). Certains logiciels, cependant, proposent de créer des images en relief à visualiser sans lunettes. Alioscopy Image Viewer[70], par exemple. Nous pouvons également évoquer la visualisation d’œuvres ou de sites (archéologiques ou architecturaux) en immersion totale. Il serait trop long d’entrer dans l’explication de concepts encore trop futuristes aujourd’hui. Les possibilités et des propositions d’application de la réalité augmentée sont exposées dans l’article « Augmenting the Real World: Augmented Reality and Wearable Computing[71]. » Cette technologie est déjà accessible aujourd’hui, mais elle est encore très coûteuse.

        

         En effet l’une des préoccupations majeures évoquées par les professionnels de l’enseignement est le coût. Combien cela coûterait d’utiliser le numérique dans une école d’histoire de l’art ? Pour l’Ecole du Louvre : rien. Il faut effectivement des ordinateurs relativement puissants, pour ne pas manquer de mémoire vive au moment où on lance une séquence audiovisuelle, par exemple. Mais les nouveaux PC DELL des grands amphithéâtres (Rohan, Michel-Ange, Goya et Dürer) sont largement suffisants. Les professeurs sont ensuite libres de connecter leur propre ordinateur portable, mais nous avons vu que cela était découragé par les régisseurs de l’Ecole. Il faut également un projecteur data relié à l’ordinateur. Au vu de la qualité des images projetées[72], ceux dont on dispose actuellement pourraient dater un peu, mais ils sont également suffisants. Enfin, il faut une bonne connexion Internet. Celle-ci est actuellement correcte, mais le passage à une connexion meilleure est, déjà prévu[73].

         Quant à l’aide technique, évoquée par Mme de Font-Réaulx, mais également par les professeurs de l’UCL interrogés par Séverine Livin et Anne Verwaerde[74], il faudrait effectivement prévoir des séances de formation à l’utilisation du numérique appliquée à un cours d’histoire de l’art. L’essentiel est de rassurer, car comme le souligne notre professeur de XIXème, le premier « blocage » est la paresse, car on pense que cela prend plus de temps, ou parce que l’on doit apprendre quelque chose de nouveau, et le deuxième est la « peur de l’inconnu. » La plus grande difficulté à surmonter pour le formateur serait donc le mur psychologique qui se dresse entre lui et ses interlocuteurs. L’utilisation elle-même est assez simple.

 

         En revanche, ce qui est plus compliqué, c’est l’adaptation aux nouvelles possibilités offertes par le numérique. En effet, pour l’instant les cours numériques auxquels nous avons pu assister étaient tout simplement une transcription d’un cours prévu pour des diapositives vers un cours informatique. Or, nous espérons, dans cette partie, avoir montré l’étendu des possibilités qu’offrait le numérique par rapport aux diapositives. Et nous n’avons malheureusement pas tout abordé, cela étant impossible dans un domaine où des nouveautés apparaissent tous les jours.

         Le risque majeur serait de faire des cours trop longs. Il est trop tentant, lorsqu’on y a accès, de montrer des vues à 360° de vases grecs, par exemple, qui sont d’ores et déjà disponibles aux professeurs sur la base EROS du C2RMF. Mais dans ce cas, ne passent-on pas plus de temps à commenter ce vase en particulier, plutôt que d’en montrer plusieurs ? Dans certains cours de l’Ecole du Louvre, les professeurs arrivent à montrer jusqu’à 80 clichés en une heure et demie. Cela fait 1min15s par cliché. La politique de l’Ecole veut que nous aillions vu beaucoup d’objets, en cours et par nos propres recherches, à la fin du premier cycle. C’est, d’après les professeurs[75], ce qui fait la différence entre l’enseignement de l’Ecole et celui de la faculté. L’université, en retour, reproche à l’Ecole de ne pas approfondir son discours et de survoler chaque époque. C’est un mauvais procès, car l’élève doit, par lui-même, approfondir chaque piste soulevée lors d’un cours. A la fin de l’année, l’élève doit être capable de rédiger une dissertation sur n’importe quel sujet traitant de l’art d’une époque ou d’une région donnée.

         Donc, le numérique pourrait faire passer plus de temps sur chaque œuvre, ou sur le contexte historique d’une époque, il pourrait également inciter à  montrer plus d’œuvres, puisqu’on pourrait aussi présenter de la vidéo et du son (qui peut, lui, être couplé à des images). Cela serait-il envisageable de prolonger la durée d’un cours, afin de le rendre plus riche et diversifié ? Les professeurs (généralement des professionnels des musées, conservateurs ou chercheurs, souvent très occupés) l’accepteraient-ils ? Les élèves resteraient-ils attentifs jusqu’au bout ? Une heure et demie au rythme actuel semble être la durée maximum de concentration d’un élève en bonne forme.

         Par ailleurs, si un professeur choisit de présenter son cours grâce à un logiciel comme PowerPoint, Impress ou Modulo, il pourrait axer son cours autour de nœuds et d’arborescences. Cela n’est pas permis avec les diapositives, il faudrait alors repenser toute la structure didactique du cours. Mais il faut également éviter de tomber dans le « gadget ». Malheureusement, cela se voit souvent dans les présentations dans des domaines où l’utilisation de PowerPoint est devenue automatique (tels que les démonstrations de marketing, de sciences, de finances, etc). Ces logiciels présentent effectivement beaucoup de possibilités, mais il faut savoir rester sobre et n’utiliser que ce qui peut réellement éclaircir son propos. C’est un des conseil donnés dans le rapport[76] de l’institut anglais CTICH (Computers in Teaching Initiative Centre for History, Archaeology & Art History) sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans l’enseignement (voir Annexe 1).

         Quoiqu’il en soit, un autre avantage de la présentation numérique d’un cours, est que celle-ci, contrairement à une séquence de diapositives, ne doit pas être détruite après le cours. Nous allons voir que cela peut également transformer le fonctionnement de l’Ecole en dehors des cours.

 

 

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III.                  Proposition pour l’utilisation du numérique avant et après le cours


A.     Recherches et communication pour les professeurs

        

         Rappelons qu’une des grandes révolutions de l’information digitale est son ubiquité et sa possible simultanéité d’utilisation[77]. Pour préparer un cours, les professeurs peuvent aujourd’hui travailler depuis chez eux. En plus des clichés, puisés sur des banques d’images ou sur des sites divers, ils peuvent également accéder à des informations qu’ils ne trouveraient pas aussi facilement et rapidement dans des livres. Certains rapports de spécialistes sur une œuvre par exemple, qui auparavant n’étaient accessibles que dans des revues très spécialisées et difficiles à obtenir, sont parfois postés en ligne. De nombreux articles de la revue Technè du C2RMF, par exemple, son accessibles sur leur site[78], souvent avant parution de ce bulletin annuel.

         Les professeurs peuvent aussi s’abonner à des listes de diffusion électroniques concernant leur spécialité. Les « listservs », serveurs automatiques de listes de diffusion électronique, permettent d’échanger des informations, de poser des questions et parfois même de rencontrer des spécialistes du monde entier. Ces listes peuvent être ouvertes à tous, ou uniquement aux personnes admises après filtrage des candidatures. Toute personne membre reçoit les mèls des autres membres, mais peut également en écrire. Dans le domaine de l’histoire de l’art[79], ces listservs sont en général hébergées par des universités, par des musées, ou par la Smithsonian Institution. Elles peuvent être liées au département d’histoire de l’art d’une université, comme la liste artcampus de l’Université de Berne, en Suisse[80]. Ou à des musées, comme le National Corvette Museum[81] dans le Kentucky, aux Etats-Unis. Ou encore à aucune entité physique, ce sont alors des communautés électroniques de spécialistes d’un domaine : c’est le cas de H-ArtHist[82] (pour l’HGA) ou de H-Islamart[83] (pour tout ce qui touche à l’art islamique).

         Dans le même esprit, il existe des forums de discussion. Le fonctionnement est à peu près le même, si ce n’est qu’il est moins direct. L’utilisateur peut poser une question sur un site Internet hébergeant un forum de discussion. Lorsque que quelqu’un a répondu à sa question, l’utilisateur reçoit un avertissement par mèl. Ce dernier ne contient généralement pas la réponse. Il doit donc aller la lire sur le site.

         On peut également s’abonner à des « newsletters », ou lettres d’information. Celles-ci ne proposent aucune interactivité, mais elles permettent de se tenir au courant des activités d’un musée ou d’une association, par exemple. En français, citons la newsletter de ANNUART[84], « l’annuaire web de l’art. »

         On pourrait évoquer comme obstacle à l’utilisation de ces moyens de communication, la langue. En effet, sur la plupart des listes internationales, la langue utilisée est l’anglais. Souvent, ces listes ont été créées par des anglo-saxons. Par ailleurs, l’anglais est actuellement la langue la plus utilisée dans les échanges entre professionnels. C’est également la langue de publication de nombreux articles scientifiques (nous classerons parmi ces derniers les articles concernant la recherche en histoire de l’art). Ainsi, que le support soit papier ou numérique, cela ne change rien. Au contraire, un texte en numérique peut être traduit (parfois un peu approximativement), par des logiciels de traduction[85].

         Les listservs, les forums et les newsletters, sont autant de moyens d’améliorer la circulation de l’information dans le domaine de l’histoire de l’art. Le professeur est informé des résultats des dernières recherches, des dernières découvertes (en archéologie, par exemple), des nouvelles parutions, des conférences et des séminaires à venir.  Ce qui est important, c’est que tout cela se fait rapidement, directement, et ne requiert aucun coût de diffusion.

         En effet, ce sont les trois grands avantages de la communication par Internet. Envoyer un mèl (sur une listserv ou à une personne) ne coûte rien et se fait instantanément. La personne qui le reçoit peut le consulter immédiatement, ou le laisser pour plus tard : le nom de l’expéditeur et le sujet du mèl s’affichent, à la réception, sur tous les logiciels de mèl. Pour l’expéditeur, cela permet de ne pas avoir le sentiment de déranger le destinataire, contrairement à un coup de téléphone, par exemple. Ensuite, lorsque le destinataire veut répondre au mèl, il peut le faire à tout moment, et envoyer sa réponse par un simple clic. Le courrier postal demande du papier, de quoi écrire, une enveloppe, un timbre, et une boîte aux lettres. De plus, c’est un mode de communication très formel : il faut soigner sa mise en page, la lisibilité de son écriture (pour une lettre manuscrite), etc. Par mèl, l’aspect rapide et direct a pris le dessus. Rares sont les utilisateurs qui insèrent encore les longues formules de politesse. Pour une réponse rapide, on ne met même plus de salutations. Certains disent que la courtoisie se perd. Peut-être, change-t-elle de forme, car on gagne en temps, et donc en délai de réponse. L’instantanéité fait que, si deux personnes sont en ligne en même temps, elles peuvent échanger plusieurs mèls d’un coup. Ne perdant pas ainsi le fil de la conversation.

        

         On a vu que la communication par Internet pouvait permettre aux professeurs d’accéder à plus d’informations textuelles, plus facilement et plus rapidement. Mais elle rend également possible la mise à jour de sa banque d’images personnelle. On peut imaginer, par exemple, qu’un professeur écrive à un archéologue pour lui demander des photographies récentes de son chantier. La majorité des chantiers possèdent maintenant un appareil numérique, l’archéologue n’a plus qu’à prendre le cliché et l’envoyer par mèl. Le professeur peut présenter à ses élèves l’état exact des fouilles en cours. Notons cependant que, pour la majorité des serveurs, il y a une limite de poids de fichiers joints à un mèl (à l’envoi ou à la réception). Si une image de très bonne définition pèse 1Mo, une photographie à envoyer par mèl ne doit pas dépasser les 500Ko si l’ont veut être sûr de sa bonne réception. Ceci dit, une image de 500Ko est déjà de très bonne définition si l’on souhaite la projeter tel quel. Ce n’est que si on souhaite faire un zoom que cela peut poser problème.

         Enfin, par son caractère un peu moins formel que le courrier postal, et plus discret que le téléphone, le mèl peut être un bon moyen de communication entre les élèves et les professeurs. A l’Ecole du Louvre, nous l’avons vu en première partie, un seul professeur d’HGA a donné son adresse mèl entre 1999 et 2003 : Mme de Font-Réaulx. Voici ce qu’elle en dit[86] :

 

« Peu d'élèves en fait profitent de cette possibilité (crainte de poser une "mauvaise" question, de déranger?). De mémoire, à peine une vingtaine de personnes m'ont envoyé un mail dans l'année (questions autour des examens comprises). Par contre, beaucoup (et je m'en réjouis) conservent cette adresse et me contactent (comme vous le faites) l'année suivante. C'est une marque de confiance que j'apprécie beaucoup. C'est aussi un lien excellent avec l'administration de l'Ecole et les chargés de TDO. »

 

         La France est un peu en retard en ce qui concerne la communication électronique. Celle-ci n’est apparemment pas encore entrée dans les habitudes des étudiants. Suggérons que les élèves aient accès à l’adresse mèl de tous les professeurs (quitte à créer des adresses spécifiques à l’Ecole pour ces professeurs), cela officialiserait l’accessibilité de nos enseignants.

 

B.     Recherches et communication des élèves

        

         En ce qui concerne les élèves, nous l’avons vu, un de leurs grands défis durant leur scolarité à l’Ecole du Louvre, est de retrouver tous les clichés projetés pendant les cours. Nous avons évoqué, à ce titre, les recherches sur Internet des images, et leur gravure sur un support copiable.

         Les professeurs d’HGA qui introduisent leur cours par quelques conseils méthodologiques, insistent souvent sur le fait qu’il faut travailler en groupe. Il est vrai que le travail de recherche, que ce soit de clichés ou d’informations diverses concertant une œuvre, est propice à la division des tâches. La méthode la plus fréquente à l’EDL est la division du travail par cours : dans un groupe de cinq élèves, par exemple, le premier ira chercher les clichés du premier cours, et en fera des photocopies pour ses camarade. Puis le deuxième cherchera ceux du cours suivant, etc. Au sixième cours, ce sera à nouveau au tour du premier élève. Sachant qu’il y a deux cours d’HGA par semaine, chaque élève ne cherche les clichés qu’une fois tous les quinze jours.

         A cause du temps passé à la bibliothèque à chercher les cotes puis à attendre les livres, et du coût des photocopies, le travail qui résulte de cette mis en commun est très exclusif et n’incite pas au partage en dehors du groupe de travail

         Dans la recherche numérique, chacun peut travailler à l’heure qu’il veut. De plus les recherches se font rapidement : il suffit de taper le titre d’un tableau pour en avoir une image, et parfois quelques articles liés à ce tableau (dont certains d’auteurs connus, présents dans la bibliographie du cours). Citons à ce propos un ancien élève de l’Ecole du Louvre, créateur d’HGAWeb, un site maintenant fermé, mais où figuraient presque tous les cours d’HGA du premier cycle, ainsi que les clichés. Voici donc ce que dit Julien Mahoudeau[87] :

 

« Aujourd'hui, une interrogation ou une recherche pertinente et complète permettront en quelques heures d'obtenir sur n'importe quel sujet une quantité d'information plus importante et plus souple à manipuler que plusieurs jours de recherche en se déplaçant dans différentes institutions. »

 

         Enfin, la transmission du travail est immédiate et gratuite. En plus, de nombreux élèves trouvent plus amusant de travailler sur ordinateur que dans une bibliothèque. Par ailleurs, avec la généralisation des connexions permanentes à haut débit et des logiciels de discussion en ligne (Trillian, ICQ, MSN Messenger, Yahoo Messenger, AIM, etc.), la recherche peut se faire à plusieurs simultanément, tout en discutant (sans risquer de déranger, comme dans une bibliothèque). L’année dernière, nous nous donnions rendez-vous en ligne le soir, et nous nous divisions la liste de clichés, afin d’aller plus vite. N’oublions pas que notre génération, et surtout la suivante, a pris l’habitude d’utiliser Internet pour les recherches, mais également pour communiquer. C’est ainsi que, souvent, cette tâche un peu fastidieuse qu’est la recherche d’images parfois très difficiles à trouver, devenait un jeu de pistes sur Internet. Pourtant, comme le remarque Deborah Seid Howes du Metropolitan Museum of Art, citant un rapport du U.S. Department of Education (DOE) :

 

« We learn more when we are solving challenging problems in meaningful contexts. Our mastery of new knowledge becomes stronger when we actively collaborate with others to communicate our understanding of what we have learned[88].  »

 

         Bien que ce rapport concerne plus particulièrement l’éducation scolaire, c’est une méthodologie qui s’applique à tous et à tous les domaines.

         Cependant, nous n’enregistrions généralement pas la provenance des images et des articles que nous téléchargions. Et ce, principalement parce que nous ne pensions pas que ce travail serait diffusé. Puisque nous ne faisions que continuer et compléter un travail qui avait été commencé l’année précédente (peut-être même l’année d’avant), par quelqu’un que nous ne connaissions pas, l’idée d’en faire profiter tous les élèves de l’EDL ne nous paraissait pas injuste. Mais tant que cela restait underground, pourquoi perdre du temps à citer nos sources ? Il est actuellement trop compliqué de noter la provenance d’un objet pris sur Internet. Cela ne se fait pas automatiquement lorsqu’on enregistre.

 

C.     Un exemple de logiciel spécialisé : eGems Communicator

 

         A Sophia-Antipolis, une alliance franco-américaine Alogic-ClustOne cherche actuellement à développer un logiciel de communication et de gestion d’objets numériques qui serait spécifiquement adapté aux besoin des enseignants et des étudiants en histoire de l’art[89]. Ce serait le fruit amélioré d’une fusion entre deux logiciels existants : eGems Communicator et eGems Collector Pro. Comme son nom l’indique, le premier est un logiciel de communication au sein d’un groupe de travail collaboratif du type « peer-to-peer », ou réseau à architecture d'égal à égal. Quant au deuxième, il s’agit d’un logiciel de collection d’information, notamment sur Internet :

 

« L'utilisation d'eGems Collector Pro est très simple. Elle est basée sur un simple ‘‘drag ‘n drop’’ (glisser - déposer). L'utilisateur sélectionne avec sa souris l'information qui l'intéresse et la fait glisser dans le répertoire de la fenêtre d'eGems qu'il aura préparé auparavant.

Ainsi, des textes entiers ou de simples phrases peuvent être stockés pour créer plus tard un dossier complet.

Les mots ne sont pas les seules sources d'informations utiles. Les images et les URL peuvent également être placées dans l'outil d'indexation eGems Collector Pro.

L'Internet, l'Intranet de votre entreprise [ou de votre école] ainsi que tout type de document peuvent venir enrichir votre base de connaissances.

Le travail collaboratif. Un module d'administration permet à chaque utilisateur de distribuer des droits à ses collaborateurs[90]. »

 

         Nous avons eu l’occasion de tester une version de l’eGems Communicator qui serait mis à disposition d’élèves en histoire de l’art[91]. Ce logiciel offre réellement une grande liberté en ce qui concerne la « récolte » d’objets en surfant sur Internet. Lorsqu’on est sur le navigateur, la fenêtre d’eGems Communicator peut se réduire à un simple diamant que l’on place où l’on veut sur l’écran. Lorsqu’on souhaite enregistrer quelque chose, on le sélectionne, puis on le glisse dans ce diamant. Puis on continue à surfer jusqu’à ce que, par exemple, on ait trouvé tous les clichés d’un cours et les informations qui nous manquaient. On peut ensuite maximiser le diamant, qui redevient une fenêtre, et consulter ses trouvailles. La fenêtre maximisée de Communicator se présente comme celle d’un explorateur de dossiers Windows, avec les dossiers d’un côté, et leur contenu de l’autre. Tous les éléments ou « gems » que l’on a enregistrés pendant la session d’Internet se sont déposés dans un dossier par défaut (à régler dans les options). On peut alors trier à sa guise.

         L’idée de eGems Collector est que chaque élément pris sur Internet (ou tout autre type de réseau), est enregistré avec le lien URL de sa source. Nous avons regretté que le logiciel n’enregistre pas également la date de consultation de ce site. En effet, tous les sites sont en constante évolution. Ils peuvent être modifiés, déménager ou même tout simplement « mourir ». Ainsi, le lien n’a pas vraiment de valeur bibliographique si l’on ne précise pas la date de consultation. Tout de même, l’URL simple est déjà un grand progrès.

         Mais l’objet étant déjà doté d’une information textuelle, sous forme d’adresse html, il nous semblait faisable de l’enrichir. Nous avons donc proposé[92], notamment pour les images, d’ajouter les cinq champs qui font ce qu’on appelle le « cartel » d’un œuvre. Nous verrons que ce cartel est essentiel pour la réussite des examens finaux. Ces cinq champs sont : le titre, l’artiste, la date, la provenance, la matière et le lieu de conservation. M. Hoch, l’un des concepteurs du projet, semblait très attiré par cette idée. Pour les élèves, cela permettrait d’associer définitivement une œuvre à son cartel (en plus de l’URL où l’image a été trouvée), sous forme de gem[93]. Nous regrettons que ce format ne soit pas standard, il faut un logiciel de la gamme eGems pour le lire.

         L’intérêt de lier Collector à Communicator, est qu’ensuite on peut partager ses gems. On peut choisir de les rendre accessible à toute la communauté (par exemple, toute l’école), ou seulement un groupe de personnes. On retrouve alors le système de travail actuel, avec des petits groupes de travail de cinq ou six élèves. Le mode de recherche et de partage utilise la même technologie de peer-to-peer, que l’on connaît depuis Napster, mais Communicator se vente d’une meilleure sécurité (bien que cela ne soit pas vraiment essentiel dans une école). Ce logiciel est donc une solution de communication en direct, non seulement de fichiers mais également de conversation. L’utilisateur est notifié de la présence en ligne de ses camarades, il peut leur envoyer des messages instantanés, ou démarrer une session de téléphone, s’il dispose d’un microphone, ou même de visioconférence s’il dispose d’une webcam. La visioconférence demande une très bonne connexion et ne présente pas, pour l’instant, un grand intérêt.

         L’idée serait de mettre ce logiciel à disposition des élèves, à la bibliothèque et dans leur salle d’informatique (pour l’instant, la salle Mondrian de l’EDL n’est accessible qu’à partir de l’année de muséologie car il n’y aurait pas suffisamment de postes pour le premier cycle). En outre, la licence (au prix raisonnable) permettrait aux élèves qui possèdent un ordinateur et une connexion Internet, d’installer eGems Communicator chez eux également.

         Les concepteurs évoquaient également l’idée que cela pourrait permettre un meilleur contact entre les élèves et les professeurs. Il est difficile d’imaginer que cela soit faisable à l’Ecole du Louvre. On pourrait imaginer des « permanences » de chargés de TDO[94] à certaines heures, qui répondraient en ligne et en direct aux questions que se posent les élèves.

 

D.    La fin du livre ?

 

         Certains professeurs ont avancé la crainte que la numérisation de l’enseignement de l’histoire de l’art, notamment en ce qui concerne les recherches des élèves, n’éloigne ces derniers des livres[95]. Au vu du contenu disponible gratuitement, instantanément et à toute heure sur Internet, ils est possible que l’on consulte moins les livres de vulgarisation. En revanche,  les grands livres de référence, tels que les Citadelles & Mazenod ou les Univers des Formes demeurent des incontournables. N’oublions pas, tout de même, que les étudiants en histoire de l’art sont des passionnés (ils ne sont sûrement pas attirés par l’aspect lucratif des professions culturelles), ils ne sont donc pas partisans du moindre effort. C’est essentiellement pour la recherche de clichés, longue et fastidieuse en bibliothèque, que l’Internet peut être une évolution logique. Par ailleurs, une image sur un écran donne une idée de ce qu’est l’objet, mais elle ne remplacera jamais la qualité d’impression des éditions citées plus haut. Les historiens d’art aiment les livres, presqu’autant que les œuvres. Un professeur de l’UCL a même fait part de son inquiétude, disant que les élèves se détacheraient des œuvres et n’iraient plus voir les originaux[96] ! N’est-ce pas ce qu’ont dit les opposants à la gravure, au XVIème siècle ? Puis les opposants aux plaques de verre, au XIXème ?

         De toute façon, il n’est pas impossible de combiner l’utilisation du numérique et celle des livres en bibliothèque. On peut imaginer la création d’une banque d’images, accessible aux élèves en bibliothèque ou depuis chez eux, qui présenterait le cliché, accompagné des cinq points de son cartel ainsi que de quelques références bibliographiques (avec la cote et les pages du livres, pour ne pas avoir à changer d’ordinateur ou de logiciel pour trouver le livre). Puisque le cartel ne suffit pas à un bon commentaire de cliché, l’élève ira nécessairement consulter les livres cités.

         Nous voudrions proposer, éventuellement, un système de mise à jour de ces références. Le professeur entrerait dans la banque d’images les clichés qu’il souhaite connus des élèves à la fin de l’année. Pour chaque image, il pourrait entrer lui-même le cartel. Cela éviterait les confusions fréquentes de dates, notamment en archéologie, où les chargés de TDO donnent parfois des dates différentes des professeurs d’HGA. Ensuite, il entrerait la ou les références bibliographiques traitant de cette œuvre en particulier. Cette fiche serait ensuite enregistrée, sécurisée et mise en ligne. Nous trouverions cela intéressant et utile de créer un champ bibliographique accessible aux élèves. Cela permettrait la mise à jour des références. Si un élève connaît une autre source d’information sur l’œuvre, un URL, un article de revue ou un livre récent, il pourrait ainsi l’entrer dans la base. Ce champ ferait, bien sûr, l’objet de réserves, puisqu’il serait difficile de surveiller tout ce qui s’y écrit. D’où la nécessité de sécuriser les champs réservés au professeur.

         On peut se demander si les élèves seraient vraiment intéressés par ce système. Cela implique de partager des informations. Cependant, nous pensons que l’idée de contribuer à une base de données qui servira pour les générations future est toujours attirante.

         Par ailleurs, cela impliquerait que les professeurs prennent le temps d’entrer le cartel de chaque œuvre. Evidemment, quelqu’un d’autre de faire la saisie. Mais ce qui est important, c’est que les données des cartels soient vérifiées et agréées par le professeur comme étant les informations qu’ils attendent des élèves lors de l’épreuve de clichés. En outre, ce travail ne devra être fait qu’une fois, ensuite ce ne seront que des mises à jour rapides.

 

E.     Les révisions

 

         Nous avons abordé le numérique dans la préparation d’un cours d’histoire de l’art, puis dans la recherche de clichés projetés. Voyons maintenant le stade chronologique suivant : comment le numérique peut changer les méthodes de révision des étudiants en histoire de l’art.

         Nous avons vu, en première partie, que certaines institutions d’enseignement d’histoire de l’art distribuaient des syllabus à leurs étudiants. Ce syllabus est généralement imprimé et peut contenir des photocopies, couleur ou noir et blanc, d’œuvres à connaître pour l’examen. Cela semble inadapté à l’EDL, puisque les professeurs attendent de nous que nous connaissions tous les clichés qu’ils auront projeté. Le budget moyen annuel de photocopies pour un élève de l’EDL cherchant tous ses clichés en bibliothèque est de 450€[97]. Si l’Ecole devait distribuer un syllabus avec tous les clichés aux 600 élèves de première année, cela coûterait au moins 75 000€[98], pour des photocopies noir et blanc, et probablement plus du double pour des photocopies couleur. On peut imaginer que cela aurait des répercussions sur les frais d’inscriptions payés par les élèves.

         Par ailleurs, un professeur présentant des images numériques en cours, nous avons vu, doit préparer un portefeuille de clichés. Ce portefeuille existe sous forme de dossier dans son ordinateur ou sur un autre support. Nous avons aussi vu que, une fois ce dossier constitué, le professeur n’avait pas besoin, d’une année sur l’autre, de le reconstituer, bien qu’il puisse l’enrichir. Mais, pourquoi ne pas en faire profiter les élèves également ? En effet, durant l’année, les élèves vont se constituer exactement le même dossier. Est-ce vraiment nécessaire ? Ainsi, on pourrait mettre sur ce cédérom, les portefeuilles de tous les professeurs, mais également leur bibliographie et, si l’on pouvait les en convaincre, le plan de leur cours. Nous ne reviendrons pas sur la quasi-gratuité de la reproduction des fichiers informatique (l’école disposant de graveurs, cela ne coûterait que le prix d’un cédérom vierge par élève, ce dernier étant sûrement disposé à le payer), ni sur le fait que la copie résultante est identique à l’original.

         Cela reviendrait, en fait, à fabriquer un syllabus numérique sur cédérom. Ce syllabus, contenant du texte et des images, pourrait être distribué sous forme de cédérom. C’est, nous l’avons déjà évoqué, ce que fait l’université de Stanford. Voici ce qu’on peut lire sur son site :

 

« Each member of the course registered for credit will receive a CD-ROM that includes the Course Reader and a complete set of images for every lecture. You will be expected to safeguard this CD, and to return it in good shape to the instructor on the day of the final examination. Since this is still an experimental use of digitized course materials, please do not allow anyone not actually enrolled in the course to borrow or to copy your CD-ROM[99].  »

 

         La dernière phrase est une sécurité juridique : elle rend illégale la copie du cédérom en question. Mais on imagine bien que, si le cédérom n’est pas protégé, il est fort probable que de nombreuses copies de ce cédérom circulent déjà. Il est naïf de croire que l’étudiant ayant réussi ses examens ne souhaite pas conserver une copie de cette source précieuse d’information, surtout quand elle est si facile à reproduire à l’identique. Tant qu’il n’existera pas de protection efficace contre la copie des cédérom, il vaut mieux, si l’on souhaite utiliser ce support, le mettre à l’entière disposition des élèves. Et dans ce cas, le seul avantage du cédérom par rapport à l’information en ligne est qu’elle ne demande pas de connexion Internet.

         Michael Greenhalgh[100], professeur émérite de l’Australian National University, a choisi, lui, de construire un méga-syllabus en ligne, sous forme de site Internet. On  y trouve beaucoup plus que le simple plan du cours et quelques images. Sont accessibles aussi des panoramiques, des images stéréo, de nombreux clichés commentés, des textes introductifs écrits pas le professeur sur les différentes époques et courants artistiques, des références bibliographiques et des liens vers d’autres sites. Le site ArtServe[101] a été mis en ligne en janvier 1994. En janvier 2003, il recevait plus de 1,2 millions de visiteurs par semaine et hébergeait plus de 170Go de données. ArtServe est un véritable syllabus des cours de M. Greenhalgh, mais accessibles à tous les étudiants d’histoire de l’art dans le monde. Voici ce que son créateur dit à propos de l’intérêt d’un document numérique contenant des liens hypertexte : « Digital materials are the way forward because they can be "layered" to address different levels of knowledge, but if necessary always using the same reservoir of images.  »

        

         Cette notion de « couche » est importante pour Michel Lefftz également, qui, dans ses présentations avec Modulo, intègre différents niveaux de lecture. Le premier est réservé à la présentation basique du cours, le deuxième assure au professeur la possibilité d’improviser, enfin, le troisième niveau de lecture est consacré aux révisions des élèves. En effet, lorsque M. Lefftz construit son cours avec Modulo, il prépare également un précieux outil de révision pour ses élèves. La présentation leur sera distribuée sur cédérom. Encore une fois, nous insistons sur le fait qu’une fois une présentation montée, la diffusion ne coûte rien. Les élèves pourront ainsi revoir le contenu du cours, avec tous les clichés. Rappelons ici qu’une présentation avec Modulo permet de présenter clairement le plan et ses arborescences. En outre, la séquence contient un lexique parfois illustré de vocabulaire architectural ainsi que plusieurs textes se rapportant au cours en annexe. Cela fait déjà du cédérom distribué un outil précieux. Mais Modulo va encore plus loin : il permet l’autoévaluation de l’élève grâce à une fonction simple mais ingénieuse d’affichage ou non des légendes. L’examen d’histoire générale de l’art à l’UCL consiste en une reconnaissance de cliché, avec commentaire. L’élève doit être capable d’associer, de mémoire, une œuvre à son cartel. Or, pour s’entraîner à ce genre d’épreuve avec des livres, il faut jongler sans cesse pour cacher la légende, et s’obliger à ne pas tricher.

 

         D’autres logiciels permettent de s’auto évaluer pour l’épreuve de cliché, même s’ils ne sont pas réellement conçus pour. En effet, pour savoir s’il est réellement capable de reconnaître tous les clichés hors contexte, l’élève doit s’interroger de façon aléatoire. Cela est possible en ouvrant un livre à n’importe quelle page et en cachant la légende. Mais il est difficile, dans un livre avec lequel on a travaillé, de ne pas regarder où est l’image par rapport au début ou à la fin. En revanche, en utilisant la fonction « présentation d’images aléatoires » sur un logiciel comme ACDSee[102] (ou bien d’autres logiciels de gestion de photothèques numériques), l’élève doit se soumettre à l’objectivité de l’informatique. L’inconvénient par rapport à Modulo, c’est qu’il doit fermer le diaporama pour consulter la légende.

 

F.     Autoévaluation et évaluation

 

         L’évaluation et l’autoévaluation sont des concepts qui reviennent souvent lorsque l’on parle de l’informatique dans l’enseignement. L’Ecole du Louvre ne propose qu’une forme d’évaluation : l’examen final. Celui-ci se divise en deux types d’épreuves : la dissertation, où l’élève dispose de trois heures pour traiter un sujet au choix parmi deux (de deux matières différentes en première année, et d’une même matière en deuxième et troisième années), et l’épreuve de cliché, où l’élève a dix minutes pour reconnaître et commenter une œuvre projetée sur un écran devant lui.

         Plusieurs fois, les élèves ont demandé à ce qu’on leur permette de s’auto évaluer plusieurs fois dans l’année, pour savoir exactement ce que le professeur attend d’eux. Cette suggestion n’a pas été retenue. Le numérique pourrait cependant proposer une solution : l’autoévaluation en ligne.

         Le CTICH[103] encourage les professeurs à créer des questionnaires à choix multiples à mettre en ligne (Internet ou réseau local accessible depuis un salle d’informatique). Les élèves sont invités à s’auto évaluer à la fin de chaque cours (cette épreuve peut également être notée, en contrôle continu). La correction du questionnaire se faisant automatiquement et instantanément, sans que le professeur ait à intervenir sur des copies papier. Le score des élèves lui est transmis par mèl. Celui-ci peut établir un score minimum, en deçà duquel, l’élève doit recommencer le test. Il peut également fournir un corrigé, avec quelques explications. L’intérêt est que l’élève, comme le professeur, sait ce qu’il lui reste à approfondir. L’évaluation peut être anonyme, ce qui permet aux élèves de ne pas être intimidés par le jugement du professeur, et de garantir un score objectif. Si une erreur est récurrente chez les élèves, le professeur en est averti rapidement et peut revenir sur le point problématique au cours suivant.

         Quelques universités ont déjà choisi ce système. C’est le cas, par exemple, de la University of Leicester, au Royaume-Uni, à travers le programme CASTLE[104] (Computer ASsisted Teaching & LEarning). La forme du questionnaire HTML est très simple, mais efficace.

 

         Cependant, l’inconvénient de la gestion informatique des évaluations est que, pour l’instant, ce système est limité aux questions à choix multiple, ou à réponse très courte. Cela permet de mesurer les connaissances factuelles d’un élève, mais pas sa compréhension de concepts plus complexes liés à une époque ou à un courant artistique. C’est ce que souligne le rapport de 1999 du CTICH[105] sur le « Computer-assisted assessment. »

         Ainsi, nous ne pensons pas qu’une épreuve informatisée puisse un jour remplacer les dissertations d’histoire de l’art des examens finaux de l’Ecole du Louvre. Quant à l’épreuve de clichés, où l’élève dispose de dix minutes pour reconnaître et commenter une œuvre, même s’il serait possible de créer une grille de correction (certains professeurs les font déjà) informatisée, cela perdrait de son sens. L’élève devrait être capable d’avancer des arguments nouveaux, à condition de bien les présenter et les défendre. Or, si l’on se limite à une grille systématique, on retire toute humanité du commentaire, que certains professeurs encouragent fortement[106].

 

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Conclusion


         En 1765, lorsque James Watt perfectionna le moteur à vapeur, il fut très rapidement installé sur les bateaux. Au début, le seul usage qu’on lui réservait était d’activer le treuil qui hissait les voiles. Ce ne fut que bien plus tard, en 1805, que fut construit le premier « bateau à vapeur ». Mais là encore, le moteur ne servait qu’à compléter la propulsion des voiles. Il fallut beaucoup de temps avant que les armateurs abandonnent définitivement les mats et les voiles, pour passer exclusivement à la propulsion à vapeur.

         Aujourd’hui, l’enseignement de l’histoire de l’art est dans une transition semblable. D’un côté nous avons l’ancien système, que nous avons appris à bien maîtriser, et dont nous nous contentons assez bien. De l’autre, une invention qui promet des miracles, mais dont nous ne savons pas encore exactement quoi faire. Les professeurs vont devoir un jour choisir entre les diapositives et numérique. C’est pour les aider dans leur choix que nous avons tenté d’évaluer les atouts et les limites du numérique dans l’enseignement de l’histoire de l’art.

         Nous pensons avoir montré que, même si l’enseignement peut être de très bonne qualité sans les images numériques et les présentations sophistiquées, les images numériques peuvent se montrer plus pratiques et plus économiques que les diapositives, sans perdre en qualité.

         Par ailleurs, il serait dommage de se laisser dépasser par la révolution qui a lieu actuellement du côté des élèves. Plus les professeurs attendent, plus ils risquent de voir leur travail, revu et déformé involontairement par les étudiants, diffusé en dehors du cercle de l’Ecole.

         L’enseignement  de l’histoire de l’art est passé à la projection d’images sur plaques de verre il y a cent ans, puis aux diapositives il y a cinquante ans. Le passage au numérique est inéluctable. L’effort de tous, professeurs, élèves, personnel technique et direction de l’école est indispensable pour que cette transition soit un succès.

         Enfin, nous invitons les professeurs à lire les précieux conseils de Mme Helen Beetham et Mme Pam Bishop, dans leur rapport pour l’institut anglais CTICH, destiné aux enseignants d’histoire de l’art confrontés au monde numérique. Vous trouverez ce document en annexe, mais en voici un extrait traduit :

 

      Il est très difficile d’appliquer des règles générales à une gamme aussi variée de technologies et de techniques. L’expérience du CTI a été que des disciplines différentes ont utilisé très différemment des TIC, et que ce qui convient pour l’enseignement et l’apprentissage d’un sujet, ne conviendra pas pour un autre. Le meilleur conseil est de consulter un expert comme ceux que vous trouverez dans le centre du CTI correspondant.

      Cependant, quelques conseils généraux s’appliquent à toutes les formas d’enseignement utilisant des technologies nouvelles.

§    Intégrez-vous au nouvel environnement de l’enseignement. L’enseignement assisté par la technologie peut être motivant, mais seulement si l’étudiant peut clairement voir sa valeur en relation avec le reste des cours, y compris l’évaluation finale.

 

§    Adaptez les moyens informatiques à vos besoins. Si vous utilisez un didacticiel qui ne peut pas être adapté, assurez-vous qu’il correspond aux objectifs de votre cours, ou pensez à demander pourquoi il a été ainsi écrit. Les développements sont très chers et prennent du temps, il est donc important que les programmes soient suffisamment flexibles pour être largement utilisés.

 

§    N’essayez pas de faire trop de chose trop tôt. Une nouvelle technologie demande à tout le moins l’apprentissage d’un nouveau savoir-faire. Cela peut signifier l’incorporation de nouvelles données, la redéfinition du résultat, voire une nouvelle conceptualisation du programme du cours. Une approche graduelle a plus de chances d’emporter l’adhésion et de mener à des changements durables.

 

§    Considérez simultanément les technologies de communication et d’information. L’utilisation d’ordinateurs dans la communication mène à d’excitantes opportunités de collaboration dans l’enseignement, que cela signifie de nouvelles façons de travailler avec des étudiants sur un campus, ou attirer des étudiants du monde entier.

 

§    Considérez le monde des logiciels en même temps que les didacticiels. De nombreuses applications qui n’ont pas été développées spécifiquement pour l’éducation sont utilisées pour améliorer l’enseignement d’une façon créative. Souvenez-vous que l’utilisation des logiciels généraux donne aux étudiants un savoir-faire transférable au monde du travail.

 

§    Assurez-vous que la technologie fonctionne et qu’elle bénéficie d’un support technique adapté. De superbes idées de cours sont inutiles si le système tombe en panne quand toute la classe se connecte. Il faut impliquer le personnel technique dès le début, et connaître la stratégie informatique et le programme de mise en place de votre université.

 

§    Assurez-vous que les étudiants et le personnel sont heureux d’utiliser cette technologie. Même un moteur de recherche sur la toile demande des connaissances de base en C&IT, sachez donc qu’il faudra peut-être investir du temps pour les acquérir, et vous devrez rechercher le support de votre institution ou de votre département.

 

§    Assurez un accès facile aux ordinateurs. Bien utilisés, les TIC permettent meilleurs accès et flexibilité. Vérifiez qu’une limite de l’accès aux machines n’introduit pas de nouvelles restrictions à l’apprentissage, ou de nouvelles inégalités parmi les étudiants. Cela peut aussi signifier encourager votre faculté ou votre établissement à mettre en place une stratégie informatique, si ce n’est déjà fait.

        

 

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Table des illustrations et annexes

 

 

Voir illustrations en format PDF.

 

 

Figure 1. Relief dit de Domitius Ahenobarbus : vue d’ensemble et montage panoramique.

 

Figure 2. Les Noces de Cana par Véronèse : original et montage.

 

Figure 3. Exemple de présentation PowerPoint (voir PDF).

 

Figure 4. Exemples de fonctions de Modulo : le « zoom » (voir PDF).

 

Figure 5. Exemples de fonctions de Modulo : le « carrousel transversal » et deux fenêtres QuickTime ouvertes simultanément (voir PDF).

 

Figure 6. Exemple d’utilisation des calques de PhotoShop : les différentes étapes de la construction de l’arche de Constantin à Rome.

Source : http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Laffineur.html

 

Figure 7. Panoramique de la Piazza del Popolo à Rome. Montage par Michael Greenhalgh, de l’Australian National University.

Source : http://rubens.anu.edu.au/htdocs/bycountry/italy/rome/popolo/piazza/pan.mov/piazza/ppopolo11.JPG

 

Figure 8. Exemples d’images stéréoscopiques de Michael Greenhalgh : l’arche du Carrousel et le Tibre du Louvre.

Source : http://rubens.anu.edu.au/new/stereo.trials/france/paris/

 

 

 

Annexe 1. Extraits du rapport du CTICH.

§         Using C&IT for learning and teaching

§         Finding appropriate CAL materials

§         Presentations and lectures

§         Computer-assisted assessment

§         Teaching and learning with the Web

§         Searching the Web

 

Annexe 2. Questionnaire initialement conçu pour cette étude, avec les réponses.

§         Questionnaire vierge 1

§         Questionnaire vierge 2

§         Réponses de Marleen Hoover

§         Réponses de Joan Fabian

 

Annexe 3. Présentation PowerPoint de la Figure 6 complète.

 

Annexe 4. Le numérique dans l’enseignement de l’histoire de l’art, analyse schématique avec PowerPoint.

 

 

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BIBLIOGRAPHIE PAPIER :

 

Livin S. et Verwaerde A., 2003 – Réseau télématique pour l'enseignement universitaire de l'histoire de l'art. Rapport de la tâche 2. Etude des besoins des utilisateurs. Etude menée pour l’Institut pédagogique universitaire et des multimédias (IPM) de l’Université Catholique de Louvain (UCL).

 

Renard J., 1993 – Bases de données et banques d’images du Ministère de l’Education nationale et de la Culture, services et établissements de la Culture (préface). Editions du Ministère de l’Education et de la Culture, direction de l’Administration générale, mission de la Recherche et de la Technologie, Paris. Page 7.

 

Seid Howes D., 1997 – Connecting with Classrooms through Computers. Actes de la IVème Conférence internationale sur l'hypermédia et l'interactivité dans les musées, ichim 1997 à Paris. Edition : Archives and Museum informatics Europe. Pages 88-99.

 

Depelsenaire J.-F., 1997 – Constituer et diffuser en commun des banques de données sur les collections de musées : l'exemple de Videomuseum. Actes de la IVème Conférence internationale sur l'hypermédia et l'interactivité dans les musées, ichim 1997 à Paris. Edition : Archives and Museum informatics Europe. Pages 312-316.

 

Turner J., 1997 – Vers la production automatisée de meta-données pour le stockage et le repérage d'image animées: travaux de recherche. Actes de la IVème Conférence internationale sur l'hypermédia et l'interactivité dans les musées, ichim 1997 à Paris. Edition : Archives and Museum informatics Europe. Pages 326-333.

 

Kirby W., 1997 – Canadian Visual Arts Information Network and the Student Interactive Imaging Program. Actes de la IVème Conférence internationale sur l'hypermédia et l'interactivité dans les musées, ichim 1997 à Paris. Edition : Archives and Museum informatics Europe. Pages 179-182.

 

Kirsch R., 1984 – Making Art Historical Sources Visible to Computers: Pictures as Primary Sources for Computer-Based Art History Data. Actes du Second International Conference on Automatic Processing of Art History Data and Documents. Pise, Italie, 1984. Publication : Regione toscana, Florence, 1984. Pages 274-290.

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE ELECTRONIQUE :

 

Tous ces sites ont été consultés pour la dernière fois le 21 mars 2004.

 

Lahanier, Ch. – Présentation de la base EROS.

http://www.c2rmf.fr/documents/c2r_eros.pdf

 

Baca M., 2000 – "Seek, and Ye Shall Find": Working Toward Integrated Access to Online Art History Resources. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Baca.html

 

Gamke P. K. et Scheerer T., 2000 – You have to become a feature of the landscape. Ubiquity in the aera of digital imagery. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Gamke-Scheerer.html

 

Hamma K, 2000 – Authenticity Online. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Hamma.html

 

Kaldenbach K., 2000 – Expanding Vermeer's 1660 painting "The View of Delft" into a 3D Virtual Reality flight over Delft and a QuickTime movie showing a "Walk Through The View of Delft". Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Kaldenbach.html

 

Laffineur R., 2000 – Teaching and Learning Art History with Digital Media at the University of Liège (Belgium). Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Laffineur.html

 

Mahoudeau J., 2000 – Étudiants en histoire de l'art et nouveaux réseaux. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Mahoudeau.html

 

Reichle I., 2000 – Deleting the Body, Art and Virtual Bodies in the Digital Age: The Use of New Media in Education: Opportunities and Challenges of Cooperative Teaching and Learning. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Reichle.html

 

Wagner K., 2000 – Beyond the surface? Art and QuickTime VR. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Wagner.html

 

Hoover M. et Fabian J., 2000 – Developing and Accessing Digitized Images in the Classroom.Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Hoover-Fabian.html

 

Greenhalgh M., 2000 – Teaching and Learning Art History using the Web. Acte du colloque CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time.

http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Greenhalgh.html

 

Greenhalgh M., depuis 1994 – ArtServe, Art & Architecture mainly from the Mediterranean Basin and Japan.

http://rubens.anu.edu.au/

 

 

SITES COMPLEMENTAIRES :

 

Résonances, bulletin mensuel d’information pédagogique du l’UCL. mars 2003.

http://www.ipm.ucl.ac.be/Resonances/2003mars.pdf

 

Augmenting the Real World: Augmented Reality and Wearable Computing

http://www.avrrc.lboro.ac.uk/vveccar.html

 

Alioscopy™ Images Viewer: Logiciel de visualisation de couples stéréoscopiques

http://www.alioscopy.com/fr/2004/documentation/documentation.htm

 

Annuart

http://www.annuart.com

 

ArchNet

http://archnet.org/

 

Artcyclopedia

http://www.artcyclopedia.com

 

Stanford University – Art 126 Post-Naturalist Painting

http://www.stanford.edu/class/arthist126/content/content.htm

 

Bases de données liste par disciplines  Histoire de l'art

http://www.bib.umontreal.ca/SB/BDD/DI_31.html

 

Clustone eGems Communicator

http://www.clustone.com

 

Asahi Class Co., Ltd. – Research and development

http://www.agc.co.jp/english/rd/topics_03.html

 

Programme d'éducation à distance du Philadelphia Museum of Art

http://www.philamuseum.org/education/distance.shtml

 

CTICH – Using C&IT for learning and teaching

http://www.arts.gla.ac.uk/www/ctich/general.htm

 

CTICH - Finding appropriate CAL materials

http://www.arts.gla.ac.uk/www/ctich/FindingCAL.htm

 

CTICH - Computer-assisted assessment

http://www.arts.gla.ac.uk/www/ctich/assess.htm

 

CTICH - Presentations and lectures

http://www.arts.gla.ac.uk/www/ctich/Preslect.htm

 

CTICH - Teaching and learning with the Web

http://www.arts.gla.ac.uk/www/ctich/WebT&L.htm

 

C2RMF

http://www.C2RMF.fr

 

Univeristy of Leicester - CASTLE Toolkit

http://www.le.ac.uk/castle/index.html

 

 



[1] A l’Ecole du Louvre, le mot « cliché » est utilisé indifféremment pour les reproductions papier, diapositives ou numériques d’une œuvre. C’est ainsi que nous l’emploierons dans ce mémoire.

[2] Faits tirés de l’acte de la conférence de Ingeborg Reichle au colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. ». Sa conférence s’intitulait : « Deleting the Body, Art and Virtual Bodies in the Digital Age: The Use of New Media in Education: Opportunities and Challenges of Cooperative Teaching and Learning ».

Voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Reichle.html

[4] Cours sur l’art du Moyen-Age pour 1ère et 2ème candidatures en Histoire de l’Art (équivalent aux deux années de DEUG français), par M. de Koninck, le 4 mars 2004.

[5]  De septembre 1999 à mai 2003, les cours que j’évoquerai seront donc compris entre ces deux dates. Je ne tiendrai pas compte des changements qui ont eu lieu cette année, car n’ont pas beaucoup d’incidence sur cette étude.

[6] M. Brême, art du XVIIIème en troisième année 2002-2003.

[7] C’est le cas, par exemple de Mme Elisseeff, en cours d’histoire des arts d’Extrême-Orient en première et deuxième années, 1999-2002.

[8] M. Bovot en cours d’archéologie de l’Egypte, en première année 1999-2001.

[9] M. Peltier, cours d’histoire des arts d’Océanie, troisième année, 2002-2003.

[10] Mme de Font-Réaulx, histoire de l’art du XIXème siècle, troisième année, 2002-2003.

 

[11] Propos recueillis lors d’une conversation informelle avec Mme O’neill, responsable du programme de Muséologie à l’EDL.

[12] D’après l’étude menée par Séverine Livin et Anne Verwaerde et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 7.

[13] Dans « Bases de données et banques d’images du Ministère de l’Education nationale et de la Culture, services et établissements de la Culture » Edité par le Ministère de l’Education et de la Culture, direction de l’Administration générale, mission de la Recherche et de la Technologie, 1993. Page 7.

[14] D’après Jean-Dominique Giulliani, président de la Fondation Robert Schumann, citant une étude du US Internet Council : http://www.robert-schuman.org/pres1.htm

[18] http://aod.pertimm.net/search/adv2/en/ (lien de démonstration pour ichim 2003)

[26] Actes d’ichim 1997, page 88.

[29] D. Seid Howes « Connecting with classrooms through computers », acte de ichim 1997, page 91.

[31] C’est ce que fait remarquer M. Ralph de Koninck, professeur d’histoire de l’art à l’UCL, dans un mèl du 22 mars 2004.

[32] Constat fait lors du stage cité précédemment au C2RMF, en décembre 2003.

[33] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. ». Sa conférence portait sur : « Teaching and Learning Art History using the Web », voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Greenhalgh.html.

[34] Dans les actes du même colloque. Sa conférence, présentée en commun avec Thorsten Scheerer, s’intitulait : « You have to become a feature of the landscape. Ubiquity in the era of digital imagery. », voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Gamke-Scheerer.pdf

[35] Mme de Font-Réaulx répondait à la question : Avez-vous déjà songé à passer aux images numériques, présentées éventuellement avec un logiciel spécialisé (du type PowerPoint ou ACDSee), pour vos cours d'HGA à l'Ecole du Louvre ?

[36] Etude menée par Séverine Livin et Anne Verwaerde et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 16.

[37] « Système de numération qui a pour base le nombre 2. Les ordinateurs utilisent le système binaire car ils ne connaissent que deux états. Ces deux états peuvent être exprimés par les chiffres 0 et 1. » Définition tirée de http://www.dicofr.com/cgi-bin/n.pl/dicofr/definition/20010101000508

[38] Communications personnelles avec M. Christian Lahanier, responsable du projet EROS au C2RMF, et avec Jérôme-François Hacquet, du Musée Guimet, travaillant actuellement sur la numérisation des photographies du chantier de fouilles de Mehrgahr. Voir également : http://www.c2rmf.fr/documents/c2r_eros.pdf

[40] Constat fait par l’auteur à la diapothèque du centre de documentation du C2RMF à Versailles, lors d’un stage en novembre-décembre 2003.

[41] Information recueillie lors du même stage au C2RMF.

[42] C’est ce qui ressort de l’étude menée par Séverine Livin et Anne Verwaerde et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 13.

[43] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. » Leur conférence s’intitulait : « Developing and Accessing Digital Images in the Classroom. » Voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Hoover-Fabian.html

[44] Marquer nettement les pixels, « picture elements », petits points lumineux affichés par l’ordinateur. Cela peut gêner la lisibilité d’une image.

[45] Le 15 octobre 2002.

[46] Tableau conservé à la fondation Calouste Goulbenkian, à Lisbonne.

[47] D’après fnac.com, darty.com et kelkoo.fr

[48] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. » Conférence présentée en commun avec Thorsten Scheerer. Voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Gamke-Scheerer.pdf

[51] Exposé de deux heures pour le cours de M. Bredael, le 27 février 2004 en Muséologie à l’Ecole du Louvre.

[52] Telles que nous avons pu voir en lors du cours de M. de Koninck sur l’art du Moyen-Age pour 1ère et 2ème candidatures en Histoire de l’Art (équivalent aux deux années de DEUG français), le 4 mars 2004.

[53] Entretien du 4 mars 2004 à l’UCL.

[55] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. » Sa conférence s’intitulait : « Teaching and Learning Art History with Digital Media at the University of Liège (Belgium). »

Voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Laffineur.html

 

[59] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. ». Sa conférence portrait sur : « Teaching and Learning Art History using the Web », voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Greenhalgh.html.

[61] Voir note numéro 46.

[62] D’après l’étude menée par Séverine Livin et Anne Verwaerde et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 13.

[63] D’après sa réponse au questionnaire posté sur le site Zoomerang.com entre le 1er et le 11 mars 2004.

[65] Extraite de la présentation test élaborée avec l’aide de Michel Lefftz, le 4 mars 2004. Ici les séquences sont ouvertes avec QuickTime.

[69] Tirées des actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. ». Sa conférence portrait sur : « Teaching and Learning Art History using the Web », voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Greenhalgh.html.

 

[72] Je me fonde sur la qualité de projection des images de mon exposé d’espagnol, le 27 février 2004 en l’amphithéâtre Dürer, car j’en connais la définition.

[73] Propos recueillis lors d’une conversation informelle avec l’informaticien de l’Ecole, en Février 2004.

[74] D’après leur étude et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 14.

[75] Propos recueillis lors de conversations informelles avec des professeurs d’HGA.

[77] Remarque de Petra Klara Gamke dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. » Sa conférence, présentée en commun avec Thorsten Scheerer, s’intitulait : « You have to become a feature of the landscape. Ubiquity in the era of digital imagery. ». Voir

 http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Gamke-Scheerer.pdf

[79] Quelques exemples sont répertoriés sur

http://www.lsoft.com/scripts/wl.exe?qL=art+history&F=L&F=T

[85] Tel que le Babel Fish d’Altavista : http://world.altavista.com/

[86] Dans un mail daté du 15 mars 2004. Elle répondait à la question : « Combien d'élèves vous ont écrit au cours de l'année pour vous poser une question ? »

[87] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. » Sa conférence s’intitulait « Étudiants en histoire de l'art et nouveaux réseaux. » Voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Mahoudeau.html

[88] Dans l’essai intitulé « Connecting with Classrooms through Computers », acte d’ichim 1997, page 89. Mme Seid Howes cite le rapport du DOE intitulé « Technology Innovation Challenge Grants », publié en 1997.

[89] J’ai eu l’occasion de faire partie du groupe de travail à ce sujet, avec Olivier Hoch et l’autre personne en charge du projet.

[91] D’après Olivier Hoch, une école à New York aurait déjà commencé à s’en servir.

[92] N’ayant pas eu de nouvelles des personnes concernées depuis que je leur ai donné  mes idées à propos de l’adaptation de eGems Communicator aux écoles d’histoire de l’art, je ne sais pas si elles ont été adoptées. En tout cas, ils avaient l’air bien intéressés.

[93] Remarquons au passage que le logiciel Modulo de Michel Lefftz permet aussi d’associer définitivement une image à une légende, mais que pour son intégration à une diapositive de présentation.

[94] Les chargés de travaux dirigés devant les œuvres sont généralement des étudiants en deuxième ou troisième cycle, à l’EDL ou à l’université.

[95] D’après l’étude menée par Séverine Livin et Anne Verwaerde et leur rapport, publié en Juillet 2003 sur le « Réseau télématique pour l’enseignement universitaire de l’histoire de l’art », page 14.

[96] Dans le même rapport, commentaire anonyme : « Le multimédia devient envahissant (jeux, enseignement) et l'image virtuelle dominante. Le risque existe de ne plus aller voir les œuvres dans la réalité dans les musées, de visiter les originaux. »

[97] Petite étude menée par l’auteur auprès des élèves de première année en 2000-2001.

[98] Calcul pour 5000 clichés, photocopiés en noir et blanc au tarif de 0,025€, distribués à 600 élèves.

[99] http://www.stanford.edu/class/arthist126/content/content.htm

[100] Dans les actes du colloque « CIHA London 2000. Thirtieth International Congress of the History of Art. Art History for the Millenium: Time. ». Sa conférence portrait sur : « Teaching and Learning Art History using the Web », voir http://www.unites.uqam.ca/AHWA/Meetings/2000.CIHA/Greenhalgh.html.

[106] Mme Elisseeff, pour son cours sur l’art d’extrême orient, et Mme Dupuis-Labbé, en cours d’art du XXème siècle,  notamment.